Décision judiciaire de Conseil d'État, 11 février 2014

Date de Résolution11 février 2014
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

no 226.383 du 11 février 2014

A. 210.117/VIII-8930

En cause : PLAINCHAMP Michaël,

Le Pachis 9 6800 Libramont-Chevigny,

contre :

HR Rail, ayant élu domicile chez

Mes Chris VAN OLMEN et Vincent VUYLSTEKE, avocats, avenue Louise 221 1050 Bruxelles.

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LE PRÉSIDENT DE LA VIII e CHAMBRE DES RÉFÉRÉS,

Vu la requête unique introduite le 4 septembre 2013 par Michaël PLAINCHAMP tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de "la décision prise, le 8 juillet 2013, par le Comité de direction de la partie adverse, d'infliger au requérant la sanction disciplinaire de la révocation" et, d'autre part, à l'annulation de cette décision;

Vu la note d'observations et le dossier administratif;

Vu le rapport de Mme PIRET, auditeur au Conseil d'État, rédigé sur la base de l'article 12 de l'arrêté royal du 5 décembre 1991 déterminant la procédure en référé devant le Conseil d'État;

Vu l'ordonnance du 12 décembre 2013 fixant l'affaire à l'audience publique du 7 janvier 2014;

Vu la notification de l'ordonnance de fixation et du rapport aux parties;

Entendu, en son rapport, M. VANHAEVERBEEK, president de chambre;

VIIIr - 8930 - 1/13

Entendu, en leurs observations, Me Monique DETRY, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Vincent VUYLSTEKE, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, Mme PIRET, auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours se présentent comme suit :

  1. Le 1er décembre 1999, le requérant entre au service de la partie adverse en qualité d'ingénieur industriel.

  2. Il affirme avoir introduit, dans le courant de l'année 2001, une demande d'autorisation de cumul pour exercer l'activité complémentaire de géomètre et ingénieur en construction, ce que confirmera son chef immédiat de l'époque dans une déclaration sur l'honneur établie le 13 décembre 2012.

    La partie adverse déclare toutefois n'avoir jamais pris de décision d'autorisation de cumul en faveur du requérant.

    Le requérant se lance dans l'exercice de son activité complémentaire en mai 2001.

    Le 25 juin 2008, il fonde avec son épouse la s.p.r.l. Bureau Michaël PLAINCHAMP qui a pour objet des activités de géomètre et d'ingénieur en construction (bureau d'études).

  3. À partir des années 2007 et 2008, le requérant et son épouse connaissent, tour à tour, de graves problèmes de santé. Son épouse décède en mars 2013 des suites d'un cancer.

  4. Du 2 août au 17 décembre 2012, le requérant est mis en incapacité de travail pour dépression.

    Pendant cette période, il affirme faire appel à des sous-traitants afin d'honorer ses contrats en cours conclus dans le cadre de son activité complémentaire.

    VIIIr - 8930 - 2/13

    5. Dans le courant du mois d'octobre 2012, la partie adverse décide de réaliser une enquête pour vérifier si le requérant exerce une activité complémentaire.

  5. Le 27 novembre 2012, le service d'enquête de la partie adverse surprend le requérant en train d'effectuer un relevé topographique d'un terrain situé dans la commune de Beauraing.

    Le rapport du service d'inspection mentionne qu' "interpellé, alors qu'il manipulait du matériel de haute technologie (notamment un trépied avec laser tournant), l'intéressé a reconnu verbalement être en congé de maladie avec sortie autorisée et qu'il effectuait un travail de «dépannage» non rémunéré pour un ami architecte. Cette sortie lui permettait de surmonter les difficultés rencontrées à domicile suite à la grave maladie contractée par son épouse".

  6. Le 6 décembre 2012, le requérant est entendu dans les bureaux du service d'inspection.

    Il déclare qu'il est en congé maladie avec sorties autorisées depuis le 2 août jusqu'au 7 décembre 2012 "pour «dépression», liée à une situation familiale délicate (maladie grave de [s]on épouse - tumeur maligne au cerveau)", que l'architecte en question lui a proposé de prendre les niveaux pour l'un de ses projets afin de lui changer les idées, qu'il ne s'agit pas d'un travail mais d'un petit coup de main totalement gratuit.

    Il ajoute qu'il a effectivement une activité complémentaire de géomètre mais qu'il a dû limiter celle-ci au strict minimum et qu'il dispose d'un ami qui a les compétences pour le remplacer. Il affirme qu'il est autorisé à exercer cette activité complémentaire et précise que le chiffre d'affaires (261.918 euros) qui figure sur le site internet mentionné par le service d'inspection est complètement erroné.

  7. Par un courriel du 14 décembre 2012, le requérant transmet à son chef de service une "déclaration sur l'honneur de [s]on chef immédiat de l'époque (en 2001), Monsieur Jean BALAES" lequel certifie, le 13 décembre 2012, ce qui suit :

    " Autorisation d'exercer l'activité de géomètre et de bureau d'études, à titre complémentaire, donnée à Michaël PLAINCHAMP, ingénieur industriel, en 2001. Déclaration sur l'honneur.

    Je soussigné Jean BALAES, ingénieur en chef-chef de division, à Infrabel Liège, et chef immédiat de Michaël PLAINCHAMP à l'époque, déclare sur l'honneur avoir marqué mon accord quand à l'octroi de l'autorisation susmentionnée en 2001. (P242 - demande d'être relevé d'une interdiction en matière d'incompatibilité). NB : une condition sûrement assortie était de ne pas exercer cette activité envers des personnes qui lui étaient subordonnées".

    VIIIr - 8930 - 3/13

    9. Le 14 février 2013, le chef immédiat du requérant, Dominique GILSON, propose de lui infliger la sanction de la révocation.

    Cette proposition est motivée comme suit :

    " Sur base d'un rapport H-HR 106 du 09/12/2012, il apparaît que

    Mr PLAINCHAMP, ing. Voie, a utilisé ses jours de maladie avec sortie autorisée pour exercer une seconde activité (géomètre) pour laquelle nous ne disposons pas, de plus, de P242! Cette fraude à la sécurité sociale est un acte d'indélicatesse (fascicule 550, chap. IV, point 78) qui doit être sanctionné par la révocation (fascicule 550, point 77)".

  8. Le 22 février 2013, le requérant introduit un recours devant le conseil d'appel.

  9. Le 27 février 2013, le chef immédiat du requérant maintient sa proposition de révocation et transmet le dossier à son supérieur hiérarchique qui, le 21 mars 2013, confirme la proposition.

  10. Le 16 mai 2013, une enquête sociale sur la situation du requérant est établie par les services de la partie adverse. Celle-ci insiste notamment sur le contexte familial dramatique dans lequel se trouvait le requérant, à l'époque de la commission des faits :

    " (…) Dès le mois d'août [2012], [l']état [de son épouse] s'aggrave très vite : en chaise roulante, et devenue de plus en plus dépendante, elle ne peut plus rester seule. Bien qu'épaulé par sa famille, notre agent n'arrive plus à tout assumer.

    Un soutien de son entourage professionnel serait alors le bienvenu. Au contraire, il dit ressentir de la part de sa hiérarchie, un sentiment de méfiance et de suspicion à son égard, et il le vit très mal.

    Malgré tout, il essaye de tenir moralement pour son épouse et pour ses enfants, mais il est totalement épuisé et stressé, et il ne parvient plus à se...

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