Décision judiciaire de Conseil d'État, 28 janvier 2014

Date de Résolution28 janvier 2014
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 226.241 du 28 janvier 2014

G./A.202.943/VI-19.381

En cause : ARMIENTO Antonio,

ayant élu domicile chez

Me Emmanuel GOESEELS, avocat, avenue de Jette, nº 32, 1081 Bruxelles,

contre :

la Région de Bruxelles-Capitale, représentée par son Gouvernement,

ayant élu domicile chez

Me Jérôme SOHIER, avocat, avenue Emile De Mot, nº 19, 1000 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ETAT, VIe CHAMBRE,

I. OBJET DE LA REQUETE

Par une requête introduite le 21 décembre 2011, Antonio ARMIENTO demande l'annulation de la décision du fonctionnaire délégué du 26 octobre 2011 déclarant son recours recevable, mais non fondé et confirmant l'amende administrative de 15.800 euros pour le logement situé rue de Laeken, 48 à 1000 Bruxelles (3ème étage avant gauche).

II. PROCEDURE DEVANT LE CONSEIL D'ETAT

Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.

Le dossier administratif a été déposé.

Mme l'Auditeur au Conseil d'Etat, Nathalie VAN LAER, a rédigé un rapport.

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Le rapport a été notifié aux parties. La partie requérante a déposé un dernier mémoire.

Une ordonnance du 22 octobre 2013, notifiée aux parties, fixe l'affaire à l'audience du 20 novembre 2013.

Mme le Président de chambre, Odile DAURMONT, a exposé son rapport.

Me Michaël PILCER, loco Me Emmanuel GOESEELS, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Jérôme SOHIER, avocat, comparaissant pour la partie adverse, ont présenté leurs observations.

Mme l'Auditeur Nathalie VAN LAER, a été entendu en son avis conforme.

Il est fait application du titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973.

III. EXPOSE DES FAITS

Les faits à l'origine de la présente affaire ont été décrits dans l'arrêt nº

207.632 du 23 septembre 2010 de manière suivante :

" A la suite d’une plainte datée du 6 février 2009 introduite par l’association sans but lucratif Convivence et à laquelle était jointe une copie d’un bail établi entre le requérant et Mehrez BEN AMOR, les services de la partie adverse ont procédé, le 20 mars 2009, à la visite du logement situé rue de Laeken, 48 à 1000 Bruxelles (troisième étage avant gauche).

Le 12 mai 2009, l’inspection régionale du logement a, d’une part, prononcé à l’encontre de ce logement une interdiction immédiate de continuer à mettre le logement en location ou de le louer ou de le faire occuper et, d’autre part, estimé le montant total de l’amende administrative à 15.800 euros sous réserve des observations et moyens à faire valoir par le requérant. Le requérant a été entendu le 9 juin 2009. A la suite de cette audition, le montant de l’amende administrative de 15.800 euros a, le 4 août 2009, été confirmé.

Par un courrier du 18 août 2009, le requérant a, par l’intermédiaire de son conseil, introduit un recours contre cette décision auprès du fonctionnaire délégué de la Région de Bruxelles-capitale. Ce recours fait notamment état du fait que le requérant n’était pas le locataire principal du bien, ni son propriétaire et qu’il n’a donc nullement la qualité de bailleur.

Le 11 septembre 2009, le fonctionnaire délégué a déclaré ce recours recevable, mais non fondé et a, en conséquence, confirmé le montant de l’amende de 15.800 euros. Il s’agit de l’acte attaqué".

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Par un arrêt n° 215.366 du 28 septembre 2011, le Conseil d’Etat a annulé, en raison de l’incompétence de l’auteur de l’acte, " la décision du fonctionnaire délégué du 11 septembre 2009 déclarant le recours de Antonio ARMIENTO recevable, mais non fondé et confirmant l'amende administrative de 15.800 euros pour le logement situé rue de Laeken, 48 à 1000 Bruxelles (troisième étage avant gauche).".

A la suite de cet arrêt, Robert DE LINGE, directeur général agissant pour le fonctionnaire délégué en congé, a, le 26 octobre 2011, restatué sur le recours du requérant qu’il a déclaré recevable, mais non fondé et a, en conséquence, confirmé le montant de l’amende administrative de 15.800 euros. Il s’agit de l’acte attaqué.

IV. PREMIER MOYEN

IV.1. Thèse de la partie requérante

Le requérant prend un premier moyen de la violation du principe général de bonne administration selon lequel tout acte administratif doit reposer sur de justes et préalables motifs, du principe général de l’obligation de motivation interne des actes administratifs, des articles 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, de l’absence d’examen sérieux du dossier, du défaut de pertinence et d’adéquation de la motivation avancée et de l’excès de pouvoir, de la violation des devoirs de soin et de minutie pris isolément et en conjonction avec : (1) les articles 2, 5, 13, 14 et 15 du Code bruxellois du Logement, (2) les articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme et les articles 14 et 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, (3) le principe général de droit selon lequel "nul ne peut invoquer sa propre turpitude", (4) 1e devoir d’examen particulier et complet de l’espèce.

Dans une première branche, le requérant reproche à l’acte attaqué d’être dirigé contre lui alors qu’il ne dispose d'aucun droit sur le bien litigieux et ne peut donc en être le bailleur. Il précise que le bailleur au sens du Code bruxellois du Logement est la société privée à responsabilité limitée COIFFURE TONINO. Il souligne que, selon l'article 15 du Code, seul le bailleur défaillant est susceptible de se voir condamner au paiement d'une amende administrative et qu’il n’est question nulle part dans le Code de la possibilité pour l'administration d'infliger une amende administrative à une autre personne que le bailleur du logement défectueux. Il observe que la lecture des travaux préparatoires du Code ne révèle aucune discussion à propos de cette définition du bailleur, que cette notion ne semble pas plus avoir posé de

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difficultés dans l'application de l'ordonnance et qu’il n'y a pas matière à interpréter ce qui est énoncé clairement. Il considère que la qualité de bailleur est donc une réalité objective et aisément vérifiable et que si le législateur avait voulu réserver à l'administration la faculté de sanctionner d'autres personnes que le bailleur, il aurait dû le spécifier expressément soit en élargissant la définition de bailleur dans l'article 2, soit en prévoyant la possibilité d'infliger une amende administrative à d'autres personnes qu'au bailleur. Il constate, toutefois, que le législateur n'ayant pas fait usage de cette faculté, la partie adverse était tenue d'appliquer le Code dans son libellé actuel et dans le respect de la légalité des infractions donnant lieu à sanction administrative et qu’elle n'était donc pas autorisée à créer une catégorie supplémentaire d'administrés susceptibles de faire l'objet...

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