Décision judiciaire de Conseil d'État, 10 décembre 2013

Date de Résolution10 décembre 2013
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

nº 225.765 du 10 décembre 2013

A. 210.104/VIII-8929

En cause : PRINCEN Alexandre, rue Vinave 38 3700 Tongres,

contre :

la société anonyme de droit public

SNCB Holding, ayant élu domicile chez Mes Chris VAN OLMEN et Vincent VUYLSTEKE, avocats, avenue Louise 221 1050 Bruxelles.

---------------------------------------------------------------------------------------------------- LE PRÉSIDENT DE LA VIIIe CHAMBRE DES RÉFÉRÉS,

Vu la requête unique introduite le 3 septembre 2013 par Alexandre PRINCEN tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de "la décision prise, le 28 juin 2013, par le Comité de direction de la partie adverse, d'infliger au requérant la sanction disciplinaire de la révocation, prenant cours le 8 juillet 2013" et, d'autre part, à l'annulation de cette décision;

Vu la note d'observations et le dossier administratif;

Vu le rapport de M. CUVELIER, premier auditeur au Conseil d'État, rédigé sur la base de l'article 12 de l'arrêté royal du 5 décembre 1991 déterminant la procédure en référé devant le Conseil d'État;

Vu l'ordonnance du 21 octobre 2013 fixant l'affaire à l'audience publique du 26 novembre 2013;

Vu la notification de l'ordonnance de fixation et du rapport aux parties;

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Entendu, en son rapport, M. VANHAEVERBEEK, president de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me Monique DETRY, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Virginie LOUCKX, loco Mes Chris VAN OLMEN et Vincent VUYLSTEKE, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. CUVELIER, premier auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours se présentent comme suit :

  1. Le requérant entre au service de la partie adverse le 20 juin 1977, en qualité de poseur de voie. Au cours de sa carrière au sein de la SNCB, il suit diverses formations et bénéficie de plusieurs promotions. Le 5 janvier 2009, il est installé comme sous-chef de gare "voyageur" à Bruxelles-Nord.

  2. Il fait l'objet, au cours de sa carrière, de plusieurs sanctions disciplinaires, notamment pour "abandon de service" et "absence injustifiée". En 1989, il est également condamné en correctionnelle, cette condamnation étant assortie d'une interdiction temporaire durant cinq ans d'exercer un emploi public. Il est, en conséquence, suspendu de ses fonctions pour une période d'un an (du 25 octobre 1994 au 26 octobre 1995).

  3. Au moment des faits, qui ont donné lieu à la procédure disciplinaire litigieuse, le requérant exerce sa fonction de sous-chef de gare "voyageurs" à la gare de Bruxelles-Nord, en prestation de nuit.

  4. Durant la nuit du 29 au 30 juillet 2012, alors que le requérant effectue une prestation de 22 heures à 6 heures à la gare du Nord, il abandonne son service pour se rendre dans un débit de boissons, en compagnie d'une collègue. En revenant vers la gare, il rencontre une prostituée, qu'il introduit dans la gare et avec laquelle il s'isole dans son bureau en vue de se livrer à une relation sexuelle tarifée. Ces faits ont été découverts par les services de la partie adverse, dès lors qu'un différend a éclaté entre la prostituée et le requérant environ une heure après qu'ils se soient isolés ensemble, et ce à la suite d'un désaccord sur le tarif convenu. Le requérant a alors

    VIIIr - 8929 - 2/12

    contacté le service "Securail" pour faire sortir la prostituée de la gare et ce service a informé la hiérarchie du requérant des faits.

  5. La partie adverse diligente alors une enquête administrative préalable, confiée au service H-HR 152, le 30 août 2012. Dans ce courrier, le supérieur hiérarchique immédiat du requérant précise qu'il entend "appliquer la sanction la plus élevée possible".

  6. Lors de cette enquête, différents protagonistes sont entendus. Bien qu'il ait fourni des déclarations contradictoires et qu'il ait refusé de reconnaître les faits par écrit, cette enquête fait apparaître que le requérant a bien eu une relation sexuelle tarifée dans son bureau avec une prostituée, durant ses heures de service.

  7. Compte tenu des faits précités, le requérant fait l'objet, le 21 décembre 2012, d'une proposition de révocation par son supérieur hiérarchique immédiat, pour les motifs suivants : " La nuit du 29 au 30 juillet 2012, alors qu'il effectuait une prestation de 22h00 à

    06h00 en gare de Bruxelles-Nord, M. PRINCEN a abandonné son service en compagnie d'une collègue pour se rendre dans un débit de boissons. À son retour, l'agent est revenu accompagné d'une prostituée, qu'il a introduite dans les locaux de la gare et avec laquelle il était convenu d'une relation sexuelle tarifiée".

    Le requérant ne se justifie pas, mais introduit un recours interne devant le conseil d'appel. Le chef immédiat maintient, quant à lui, sa proposition de révocation et transmet le dossier à l'inspecteur principal-chef de division qui, à son tour, le 11 janvier 2013, marque son accord avec la proposition de révocation.

  8. Une enquête sociale est alors ordonnée, dans le cadre de la procédure de recours, laquelle est finalisée le 15 février 2013. Elle fait notamment état des problèmes de santé importants de l'épouse du requérant, et de la situation financière difficile de son ménage. L'état de santé du requérant est également abordé (il est hospitalisé au moment où l'enquête est clôturée).

  9. Le 27 février 2013, Geert VAN DROOGENBROECK, conseiller en chef-chef de division, établit le rapport à destination du conseil d'appel. Ce rapport, qui contient l'avis du département des ressources humaines de la partie adverse, est rédigé comme suit : " Bien qu'ils soient actuellement niés par l'intéressé, les faits ne sont nullement douteux. Les déclarations de l'agent de sécurité NYOKA TOKOTALA et de Mme STEEGMANS confirment les aveux verbaux faits par M. PRINCEN devant son chef immédiat : Durant sa prestation, l'agent a abandonné son service pour se rendre dans un débit de boissons et a ensuite sollicité les services d'une prostituée, qu'il a invitée à venir sur son lieu de travail. Il s'est de ce fait rendu coupable d'inconduite en service.

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    Conformément aux dispositions du paragraphe 72 du RGPS 550, les actes d'indiscipline autres que le refus d'obéissance, tels que propos injurieux ou attitude grossière envers un supérieur etc., sont réprimés, lorsqu'il s'agit d'une première fois, par une punition allant jusqu'à la rétrogradation temporaire, avec menace de révocation en cas de récidive. Les faits de cette nature lorsqu'ils sont particulièrement graves, sont passibles de la rétrogradation pour une période indéterminée, avec menace de révocation en cas de récidive et même de la révocation.

    Dans le cas présent, les faits sont incontestablement graves : non seulement l'agent a abandonné son service pour se rendre dans un débit de boissons, ce qui constitue déjà un comportement irresponsable de la part d'un agent chargé de fonctions de sécurité mais en plus, il a sollicité les services d'une prostituée sur son lieu de travail...

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