Décision judiciaire de Conseil d'État, 7 février 2013

Date de Résolution 7 février 2013
JuridictionVIII
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R Ê T

nº 222.420 du 7 février 2013

A. 192.749/VIII-6906

En cause : COECKELBERGHS Luc, ayant élu domicile chez Me Vincent DE WOLF, avocat, avenue de la Toison d'Or 68/9 1060 Bruxelles,

contre :

le centre public d'action sociale de Molenbeek-Saint-Jean, représenté par le conseil de l'action sociale, ayant élu domicile chez Me Thierry STIÉVENARD, avocat, avenue des Crocus 48 1070 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ÉTAT, VIIIe CHAMBRE,

Vu la requête unique introduite le 25 mai 2009 par Luc COECKELBERGHS tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de "la décision du Conseil de l'action sociale de Molenbeek-Saint-Jean datée du 10 avril 2009 «décidant d'appliquer à Monsieur COECKELBERGHS la sanction consistant en une suspension de trois mois à partir du 16 avril 2009»" et, d'autre part, à l'annulation de cette décision;

Vu l'arrêt nº 195.183 du 9 juillet 2009 rejetant la demande de suspension;

Vu la demande de poursuite de la procédure introduite par la partie requérante;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

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Vu le rapport de Mme VANDERHELST, auditeur adjoint au Conseil d'État, rédigé sur la base de l'article 12 du règlement général de procédure;

Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires;

Vu l'ordonnance du 28 décembre 2012 fixant l'affaire à l'audience publique du 1er février 2013;

Entendu, en son rapport, M. VANHAEVERBEEK, président de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me Fabien FRÉROTTE, loco Me Vincent DE WOLF, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me Philippe LEVERT, loco Me Thierry STIÉVENARD, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. JOASSART, auditeur au Conseil d'État;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen du recours ont été exposés dans l'arrêt n° 195.183, précité; qu'il y a lieu de s'y référer;

Considérant que le requérant prend un premier moyen de la violation des articles 2 et 3 de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs, du principe de la motivation formelle des actes administratifs, de l'article 60, § 8, de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'action sociale et du règlement d'ordre intérieur du CPAS de Molenbeek-Saint-Jean du 22 février 1995 pris en application de l'article 60, § 8, précité; qu'il reproche à l'acte attaqué d'être motivé, en ses visas, par l'article 60, § 8, précité, et par le règlement d'ordre intérieur du CPAS de Molenbeek-Saint-Jean, précité, alors qu'in specie, le receveur n'a pas fait usage de la possibilité qui lui était offerte par ces textes de désigner, en vertu de l'article 1er du règlement d'ordre intérieur, précité, les personnes chargées de recevoir, garder et restituer les valeurs des personnes admises à la résidence de repos et de soins Arcadia; qu'il constate, à cet égard, que, dans son courrier daté du 16 septembre 2008, la partie adverse fait d'ailleurs état de son ignorance quant à cette hypothétique désignation puisqu'elle a demandé au requérant à quelle date serait intervenue une telle désignation alors qu'à supposer qu'il y ait eu désignation, quod non, elle aurait dû en être la première avertie, une concertation

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avec le secrétaire étant requise pour déléguer valablement la compétence de gestion des dépôts incombant au receveur et l'article 1er in fine du règlement d'ordre intérieur, précité, prévoyant que "le Conseil en est informé"; qu'il se réfère, à cet égard, également à l'article 46 de la loi du 8 juillet 1976, précitée, qui fait du receveur le seul fonctionnaire habilité à "manipuler les deniers" des centres publics d'action sociale; qu'il fait, en outre, valoir que les valeurs déposées dans les coffres de la résidence Arcadia n'ont prima facie pas été prises en compte lors de l'établissement du compte de gestion réalisé à l'occasion du départ du receveur honoraire OPHALVENS, le 31 juillet 2008; qu'il ne peut lui être reproché sans absurdité de n'avoir pas attiré l'attention du receveur sur le fait que des objets et/ou valeurs lui étaient confiés et qu'il tombe sous le sens qu'une institution comptant près de deux cent cinquante lits voie transiter par ses coffres des objets et/ou valeurs confiés et/ou perdus par ses résidents; qu'il se réfère, à cet égard, aux déclarations de Guy ROZEN, secrétaire honoraire et ancien receveur du CPAS de Molenbeek-Saint-Jean lequel affirme : "Le Receveur du CPAS ne peut tout de même pas ignorer qu'occasionnellement, des objets de valeur, souvent des bijoux, fassent un passage dans les coffres se trouvant à Arcadia sous sa responsabilité exclusive. J'estime qu'un Receveur a à s'inquiéter de ces choses là. C'est ce que j'estimais quand j'étais secrétaire. Le secrétaire n'a cependant pas d'injonction à donner au Receveur, qui travaille sous la seule autorité du Président"; qu'il soutient que le contrôle et la gestion des coffres incombaient dès lors à la seule personne du receveur, lequel eut dû acquitter ses fonctions avec un sens des responsabilités accru et plus d'initiative et que preuve en est que le receveur DE VILLÉ a effectué d'initiative l'inventaire des coffres de la résidence Arcadia; qu'il en déduit qu'il ne peut lui être valablement reproché de violer des règles légales et règlementaires qui ne concernent en aucune manière sa fonction de directeur puisque le receveur, en l'absence de délégation, était seul compétent pour recevoir lesdites valeurs; que pour le surplus, se référant au "dépôt d'objets divers" tel que rapporté par l'inventaire dressé par le receveur DE VILLÉ, il constate qu'il ne peut être question, en fait, de violation de l'article 60 de la loi du 8 juillet 1976, précitée, pas plus que de violation du règlement d'ordre intérieur en ce qu'il ne s'agit aucunement de valeurs, celles-ci devant être entendues comme "tout titre négociable, côté ou non en bourse" dès lors que les objets trouvés sont inter alia des boutons de manchettes, cuillers à café, bagues de fantaisies et portefeuille en plastique vide; qu'il soutient enfin, que même à considérer qu'il y eut une délégation en sa faveur (quod non), les valeurs déposées dans les coffres seraient restées sous la responsabilité du receveur, lequel est placé sous l'autorité directe du président du CPAS (article 46, § 1er, in fine de la loi du 8 juillet 1976 organique des CPAS) et que, dès lors, les incriminations portées à son encontre et justifiant la mesure disciplinaire contestée à l'estime de la partie adverse manquent tant en droit qu'en fait; qu'il en conclut que la motivation de l'acte attaqué n'est pertinente ni en droit, ni en fait;

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Considérant qu'en réplique, le requérant soutient que le rapport de faits précis est une condition sine qua non de la poursuite de la procédure disciplinaire, condition qui n'aurait pas été satisfaite en l'espèce; qu'il fait, à cet égard, valoir que s'il a reconnu avoir suppléé, à la demande des résidents, les carences du receveur en acceptant le dépôt de menus objets qu'il plaçait dans un grand coffre - lesquels ne peuvent en aucun cas être considérés comme des "valeurs" -, il n'avait connaissance ni de la provenance ni du contenu des deux petits coffrets fermés placés en-dehors de ce grand coffre, lesquels se sont, à leur ouverture, révélés contenir des valeurs exprimées en espèces; qu'il ajoute avoir, par ailleurs, exposé lors de son audition que les objets découverts dans ce grand coffre avaient été, pour la plupart, trouvés au sein même de la résidence (objets perdus / trouvés à la lingerie); qu'il estime que la partie adverse demeure en reste d'apporter un quelconque élément tendant à prouver qu'il aurait manqué de restituer les objets confiés et qu'il aurait accepté, à une date par elle inconnue, le dépôt des deux petits coffrets, lesquels se sont révélés contenir des "valeurs" au sens des dispositions visées au moyen; qu'il relève enfin que l'acte attaqué repose sur d'autres considérants juridiques que la prétendue violation des articles 60, § 8, de la loi du 8 juillet 1976, précitée, et 1er du règlement d'ordre intérieur, précité, qui ne lui sont pas applicables; qu'à cet égard, il constate que l'acte attaqué lui fait grief de ne pas avoir averti le receveur du dépôt de "valeurs" qui lui auraient été confiées alors que, lors de son audition, il a précisé qu'il lui arrivait d'accepter des objets-contenants sans pour autant en connaître le contenu en sorte qu'il est singulier que l'acte attaqué lui reproche de violer l'article 1931 du Code civil qui dispose que le dépositaire "ne doit point chercher à connaître quelles sont les choses qui lui ont été déposées, si elles lui ont été confiées dans un coffre fermé ou sous une enveloppe cachetée"; qu'il rappelle que c'est le receveur DE VILLÉ qui a procédé elle-même à l'ouverture des enveloppes nominatives contenues dans le grand coffre et au forçage de la serrure des petits coffrets et s'étonne dès lors de cette incrimination portée contre lui; qu'il relève que l'acte attaqué lui fait également grief d'avoir contrevenu à l'article 1937 du Code civil : "le dépositaire ne doit restituer la chose déposée, qu'à celui qui la lui a confiée, ou à celui au nom duquel le dépôt a été fait, ou à celui qui a été indiqué pour le recevoir"; qu'il estime que cette accusation se heurte au reproche qui lui est fait de ne pas avoir restitué lesdits objets confiés, à l'ouverture des coffres faite "d'initiative" par le receveur DE VILLÉ "dans le cadre de ses nouvelles fonctions de receveur" ainsi qu'à l'article 100 de la loi du 8 juillet 1976, précitée, lequel prévoit qu'en cas de déshérence, les effets apportés par les résidents qui n'ont pas été réclamés dans les trois ans du...

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