Décision judiciaire de Conseil d'État, 9 mai 2012

Date de Résolution 9 mai 2012
JuridictionXV
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

A R R Ê T

nº 219.272 du 9 mai 2012

A. 203.917/XV-1881

En cause : COLMANT Benoît, ayant élu domicile chez Me P. MELAN, avocat, rue du Postil 1/1 5070 Fosses-la-Ville,

contre :

l'État belge, représenté par le Ministre de la Justice, ayant élu domicile chez Mes M. PREUMONT et H. HIERNAUX, avocats, avenue de Marlagne 165 5000 Namur. -----------------------------------------------------------------------------------------------------

LE PRÉSIDENT DE LA XV e CHAMBRE SIÉGEANT EN RÉFÉRÉ,

Vu la requête introduite le 1er mars 2012 par Benoît Colmant, en ce qu’elle tend à la suspension de l’exécution de la décision «du 6 juin (lire: janvier) 2012 par laquelle (…) le ministre de la Justice (rejette) un recours introduit (…) contre une décision du gouverneur de la province de Namur prononcée le 10 juin 2011» refusant au requérant son agrément d’armurier;

Vu le dossier administratif et la note d’observations déposée par la partie adverse;

Vu le rapport de M. E. THIBAUT, premier auditeur au Conseil d'Etat;

Vu l'ordonnance du 25 avril 2012 fixant l'affaire à l'audience du 4 mai 2012 à 9 heures 30;

Vu la notification aux parties du rapport et de l'avis de fixation à l'audience;

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Entendu, en son rapport, M. M. LEROY, président de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me P. MELAN, avocat, comparaissant pour le requérant, et Me P.-Y. DERMAGNE, loco Mes M. PREUMONT et H. HIERNAUX, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. E. THIBAUT, premier auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l’examen du recours se présentent comme suit:

Benoît Colmant exerce la profession d’armurier depuis le 22 décembre 1998 sur la base d’un agrément délivré par le gouverneur de la province de Namur. Le 16 mars 2009, les services du gouverneur accusent réception d’une demande de renouvellement de cet agrément. Le 7 août, ils demandent au procureur du Roi de Namur et au bourgmestre de Sambreville d’émettre un avis sur cette demande. Le 13 août, le bourgmestre émet un avis favorable en se fondant sur l’enquête réalisée par le service de police de proximité. Le 26 janvier 2010, le procureur du Roi, évoquant un fait de coups et blessures involontaires et un différend commercial, émet également un avis favorable. Le 5 mars, les services du gouverneur sont informés par la police de Sambreville que le requérant fait l’objet d’un procès-verbal en matière d’armes. Le 13 juillet, le service des exportations d’armes de la Région wallonne informe les services du gouverneur que le requérant a tenté d’importer d’Israël des pièces pour armes de poing en les faisant passer pour des pièces d’airsoft et que, face aux doutes de la société d’importation, il a fait repartir le colis vers Israël. Le 28 juin, les services du gouverneur demandent au procureur s’il maintient son avis favorable à la suite de deux procès-verbaux établis à charge du requérant, dont celui signalé par la police de Sambreville. Le 28 juillet, le procureur indique que son office a été, depuis son avis favorable du 26 janvier 2010, saisi de deux nouveaux dossiers concernant le requérant, le premier portant sur l’achat, en toute illégalité, de trois armes soumises à autorisation par le requérant à un particulier non détenteur d’autorisations valables, le second sur l’absence de toute personne à l’intérieur de l’armurerie laissée ouverte par le requérant qui n’a pu être contacté que quinze minutes plus tard et s’est présenté sentant l’alcool. Il conclut que l’exercice de la profession d’armurier par le requérant présente un risque pour l’ordre public en telle sorte qu’il émet un avis défavorable au renouvellement. Le 22 novembre, la police judiciaire fédérale de Namur établit un rapport indiquant qu’à l’occasion d’un

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contrôle de l’armurerie du requérant, de nombreuses infractions ont été relevées, dont un certain nombre portent sur des armes automatiques ou prohibées, des faux en écritures et des détentions illégales d’armes. Le 25 janvier 2011, les services du gouverneur demandent au procureur du Roi son avis à propos des conclusions de la perquisition menée par la police judiciaire fédérale chez le requérant le 17 novembre 2010, des infractions relevées et de leur caractère attentatoire à l’ordre public au sens de l’article 5, § 3, alinéa 2, de la loi sur les armes; ils demandent si un renouvellement probatoire ne pourrait pas être accordé. Le 17 mars, le procureur indique au gouverneur qu’il maintient son avis défavorable, que, depuis cet avis, le requérant fait l’objet d’une instruction du chef de multiples infractions à la législation sur les armes, que huit dossiers rédigés par la police ont été joints à l’instruction, que ces dossiers sont relatifs à des détentions et à des cessions illégales d’armes, qu’ils démontrent un danger pour l’ordre public, que la légitime confiance que l’on peut avoir en un armurier est ébranlée car le requérant a racheté des armes en toute illégalité et en connaissance de cause, qu’il en va de même pour ce qui concerne la négligence consistant à laisser la porte de l’armurerie ouverte, que le requérant a déjà bénéficié de l’indulgence des autorités administrative et judiciaire et qu’il ne lui paraît plus opportun que l’agrément soit renouvelé. Le 25 mars, les services du gouverneur invitent le requérant à leur faire part de ses observations à propos d’un éventuel refus de renouvellement de l’agrément. Le 5 mai, le requérant semble avoir été entendu par les services du gouverneur. Le 10 juin, le gouverneur refuse le renouvellement de l’agrément du requérant.

Le 22 juin, le requérant introduit un recours auprès du ministre de la Justice contre la décision du gouverneur. Le 8 août, le président du tribunal de première instance de Namur siégeant en référés, rejette la demande de suspension de la décision du gouverneur de la province, le requérant ne démontrant pas qu’il existerait une atteinte fautivement portée aux droits subjectifs dont il se prévaut. Le 25 août, le conseil du requérant indique à la partie adverse que son client souhaite être entendu. Le 30 août, le ministère demande l’avis des procureurs du Roi de Mons et de Namur et du bourgmestre de Dour sur le renouvellement de la demande d’agrément. Le même jour, il demande à la zone de police Samsom si le requérant s’est manifesté depuis l’établissement des différents procès-verbaux. Il leur est répondu le 2 septembre suivant par la mention d’une audition du 11 juin 2010. Le 14 septembre, le bourgmestre de Sambreville fait sien l’avis défavorable de la police locale motivé par les procès-verbaux dont le requérant fait l’objet. Le 19 septembre, la zone de police de Dour indique que c’est la zone de police de Sambreville (Samsom) qui pourrait donner des informations utiles. Le 29 septembre, le procureur du Roi de Namur indique que l’instruction du dossier répressif à la charge du requérant est terminée et que des réquisitions de renvoi devant le tribunal

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correctionnel ont été prises par son Office mais qu’aucune date de comparution devant la chambre du conseil n’a été fixée. À ce courrier, sont joints des procèsverbaux établis à la charge du requérant en matière d’armes ou de détention d’explosifs. Le 7 décembre, le requérant est convoqué par le ministère en vue d’être entendu le 12. Il s’est rendu à la convocation, mais le dossier ne contient aucun procès-verbal de cette audition. Le 16 décembre, le procureur du Roi de Mons, arrondissement judiciaire où réside alors le requérant, indique au ministère que le requérant n’est pas connu par son agent de quartier, que les faits infractionnels relatifs à la loi sur les armes ont été commis dans l’arrondissement de Namur, que son collègue de Namur a dû ou devra donner des...

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