Décision judiciaire de Conseil d'État, 8 mai 2012

Date de Résolution 8 mai 2012
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

nº 219.270 du 8 mai 2012

G./A.198.815/VI-18.966

En cause : la société anonyme PHARMANET,

ayant élu domicile chez

Mes Luc MISSON et Sylvie BREDAEL, avocats, rue de Pitteurs, nº 41, 4020 Liège,

contre :

l'Etat belge, représenté par la Vice-Première Ministre et Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de Beliris et des Institutions culturelles fédérales,

ayant élu domicile chez

Mes Pierre LEGROS et Jérôme SOHIER, avocats, avenue Emile De Mot, nº 19, 1000 Bruxelles.

------------------------------------------------------------------------------------------------------ LE CONSEIL D'ETAT, VIe CHAMBRE,

  1. OBJET DE LA REQUETE

    Par une requête introduite le 5 janvier 2011, la société anonyme PHARMANET demande l'annulation de "la décision prise en date du 9 novembre 2010, par Madame Laurette Onkelinx, Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, chargée de l’Intégration sociale, par laquelle la demande du 8 avril 2004, en vue d’obtenir l’autorisation de transférer l’officine pharmaceutique ouverte au public, sise à 1040 Bruxelles, avenue d’Auderghem, 261 vers 1040 Bruxelles, avenue d'Auderghem, 198, est rejetée, le Ministre se ralliant à la motivation qui a déterminé l’avis défavorable prononcé par la Commission d’implantation des officines pharmaceutiques en date du 21 septembre 2010".

  2. PROCEDURE DEVANT LE CONSEIL D'ETAT

    Les mémoires en réponse et en réplique ont été régulièrement échangés.

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    Le dossier administratif a été déposé.

    M. le Premier auditeur au Conseil d'Etat, Christian AMELYNCK, a rédigé un rapport.

    Le rapport a été notifié aux parties. La partie requérante a déposé un dernier mémoire.

    Une ordonnance du 27 février 2012, notifiée aux parties, fixe l'affaire à l'audience du 28 mars 2012.

    M. le Conseiller d'Etat, David DE ROY, a exposé son rapport.

    Me Sylvie BREDAEL, avocat, comparaissant pour la partie requérante et Me Rémi QUINTIN, loco Mes Pierre LEGROS et Jérôme SOHIER, avocat, comparaissant pour la partie adverse, ont présenté leurs observations.

    M. le Premier auditeur, Christian AMELYNCK, a été entendu en son avis conforme.

    Il est fait application du titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973.

  3. EXPOSE DES FAITS

  4. 1. Par une lettre du 8 avril 2004, la requérante a introduit une "demande d’autorisation pour le transfert d’une officine ouverte au public dans la proximité immédiate", en application de l’arrêté royal du 25 septembre 1974 concernant l’ouverture, le transfert et la fusion d’officines pharmaceutiques ouvertes au public.

    La demande de transfert était essentiellement motivée par un litige avec le bailleur des locaux abritant la pharmacie et par une menace d’expulsion immédiate.

    De nombreuses annexes étaient jointes à la lettre, dont le formulaire de demande, une "note explicative sur les raisons du transfert et la priorité", l’attestation d’enregistrement de la pharmacie, les statuts de la société anonyme PHARMANET, la copie d’une option d’achat sur l’immeuble vers lequel le transfert était envisagé, un reportage photographique et cartographique de la situation existante et de la situation projetée, avec évaluation des distances par rapport aux pharmacies voisines, des

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    courriers échangés avec le bailleur des locaux actuellement occupés par la pharmacie, etc.

  5. 2. Le 15 avril 2004, le pharmacien-inspecteur a fait part à la commission d’implantation des officines de son rapport sur la demande de transfert dans les termes suivants :

    " [...]

    La distance de ce transfert est d’environ 304 mètres.

    Deux officines sont situées dans le voisinage proche de l’officine (Pharmacie des 4 Coins) à transférer :

    - La Pharmacie de la Chasse Av. d’Auderghem, nº

    344.

    - La Pharmacie appartenant à la S.A. Les Pharmacies Réunies Av. d’Auderghem no 138.

    Tableau reprenant la distance entre l’endroit actuel occupé par la pharmacie des 4 Coins et l’endroit projeté par rapport aux deux officines les [plus] proches.

    Pharmacie des 4 Coins, Avenue d’Auderghem 261 à

    1040 Bruxelles

    Pharmacie de la Chasse, Avenue d’Auderghem 344 à 1040 Bruxelles

    Distance avant transfert : environ 206 m

    Distance après transfert : environ 510 m

    Pharmacie des 4 Coins, Avenue d’Auderghem 261 à

    1040 Bruxelles

    Les Pharmacies Réunies, Avenue d’Auderghem 138 à 1040 Bruxelles

    Distance avant transfert : environ 519 m

    Distance après transfert : environ 215 m

    Le transfert projeté a pour conséquence : - d’éloigner d’environ 304 mètres la pharmacie des 4 Coins de l’officine appartenant à la S.A. Pharmacie de la Chasse qui est actuellement distante d’environ 206 mètres de l’endroit actuel.

    - de rapprocher d’environ 304 mètres la pharmacie des 4 Coins de l’officine appartenant à la S.A. Les Pharmacies Réunies qui est actuellement distante d’environ 519 mètres de l’endroit actuel.

    Le transfert projeté ne contribue donc pas à une meilleure répartition des officines du secteur.

    Eu égard à la situation de l’officine appartenant à la S.A. Les Pharmacies Réunies, il appartiendra à la Commission d’implantation d’estimer si ce transfert peut être considéré comme un transfert à proximité immédiate.

    [...]".

  6. 3. Le 14 mai 2004, le pharmacien titulaire des "Pharmacies Réunies", 138 avenue d’Auderghem, a écrit à la commission d’implantation pour lui faire part de son "désaccord total" sur le transfert.

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    III. 4. Le 21 juin 2004, la commission d’implantation a émis l’avis suivant :

    " Vu la demande introduite le 8/4/2004 [...];

    Attendu que le dossier a été présenté à la Commission en séance du 21/6/2004;

    Vu l’arrêté royal no 78 du 10/11/1967 [...] et vu l’arrêté royal du 25/9/1974 [...];

    Vu le rapport écrit de l’Inspecteur régional de la pharmacie (article 15 de l’A.R. du 25/9/1974);

    Entendus à la séance du 21/6/2004, avec l’accord de la Commission, la demanderesse et son conseil, Me BALATE;

    Attendu que la distance de transfert dépasse les 100 mètres prévus à l’article 1er, § 4, 2o de l’arrêté royal du 25/9/1974, s’agissant d’une distance de 304 mètres environ;

    Que si le transfert était accordé, l’officine transférée se rapprocherait de 519 m à 215 m de la pharmacie la plus proche, à savoir la S.A. Pharmacies Réunies;

    Attendu que la localisation des pharmacies concernées dans la région bruxelloise, où l’on note une forte concentration des officines, pourrait porter préjudice à l’une des pharmacies concernées tout en améliorant la situation des deux autres les plus proches;

    Attendu qu’ainsi, la Commission estime que la demande se rapporte à un transfert en dehors du voisinage immédiat;

    Que la demanderesse sera informée de cet avis et qu’elle pourra convertir sa demande dans le délai de trente jours, selon les dispositions prévues à l’article 15, § 2 de l’arrêté royal du 25/9/1974;

    [...]".

  7. 5. Le 5 juillet 2004, la commission d’implantation des officines pharmaceutiques a adressé le courrier suivant à la requérante :

    " [...]

    En sa séance du 21/6/2004, la Commission d’implantation des officines a examiné votre demande précitée, introduite le 8/4/2004.

    Considérant la distance du transfert sollicité, soit environ 304 mètres, et le rapprochement significatif de l’officine projetée par rapport aux officines existantes, la Commission a estimé qu’une procédure de transfert dans la proximité immédiate ne peut pas être admise et qu’il y a lieu d’appliquer la procédure hors de la proximité immédiate.

    Conformément aux dispositions de l’article 15, § 2, de l’arrêté royal du 25/9/1974 concernant l’ouverture, le transfert et la fusion d’officines pharmaceutiques ouvertes au public, je porte donc à votre connaissance que vous pouvez, dans les trente jours de la présente notification, convertir votre demande d’autorisation de transfert dans la proximité immédiate en une demande de transfert en dehors du

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    voisinage immédiat, en payant le supplément résultant de la différence entre la rétribution due pour le transfert hors de la proximité immédiate et la rétribution due pour le transfert à proximité immédiate.

    En pratique, si cette proposition vous agrée, il convient de :

    1. procéder au paiement du montant de 3720 EUR - 992 EUR, soit 2728 EUR [...]

    2. me communiquer par lettre recommandée votre décision de recourir à la procédure de transfert hors de la proximité immédiate en y joignant la preuve du paiement de la somme de 2728 EUR susmentionnée.

    Enfin, j’attire votre attention sur les dispositions de l’article 15, § 3 de l’arrêté royal du 25/9/1974 précité qui stipulent que : «si, dans un délai de trente jours suivant cette notification, le demandeur s’abstient de convertir de cette manière sa demande de transfert dans la proximité immédiate en un transfert en dehors du voisinage immédiat, il est réputé renoncer expressément à sa demande» [...]".

  8. 6. Par une lettre recommandée du 13 juillet 2004, la requérante a converti sa demande en une demande de transfert hors de la proximité immédiate et a joint la preuve du paiement demandé.

  9. 7. Le 8 août 2004, la demande de transfert a été notifiée à la Pharmacie de la Chasse et à la société anonyme Les Pharmacies Réunies, conformément à l’article 6, § 1er, de l’arrêté royal du 25 septembre 1974.

  10. 8. Le 29 octobre 2004, Pierre-Pascal HECQ, administrateur-délégué de la requérante, a levé, au nom de la société anonyme IMMOBILIERE SAINT-GEORGES, l’option d’achat que lui avait consentie le propriétaire de l’immeuble vers lequel le transfert était demandé.

  11. 9. Le 23 décembre 2004, l’office des pharmacies coopératives de Belgique a adressé un avis favorable à la commission d’implantation.

  12. 10. Le 7 janvier 2005, le gouverneur de Bruxelles-Capitale a adressé à la commission un avis selon lequel "le transfert en question ne soulev[ait] aucune objection de [sa] part".

  13. 11. Le 18 janvier 2005, l’association pharmaceutique belge a adressé à la commission d’implantation un avis négatif sur le transfert, fondé - en...

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