Décision judiciaire de Conseil d'État, 6 mars 2012

Date de Résolution 6 mars 2012
JuridictionXI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

A R R E T

nº 218.326 du 6 mars 2012

A. 193.687/XI-18.406 (anciennement A. 193.687/VIII-7.030)

En cause : VAN REGEMEUTER Jean-Luc, ayant élu domicile chez Me M. UYTTENDAELE, avocat, rue de la Source 68 1060 Bruxelles,

contre :

l'Etat belge, représenté par le ministre de l'Intérieur. ------------------------------------------------------------------------------------------------------

LE CONSEIL D'ETAT, XI e CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 12 août 2009 par Jean-Luc VAN REGEMEUTER, en tant qu’elle demande l’annulation de «la décision de Monsieur Olivier LIBOIS, directeur général à la Direction générale de la police administrative, du 22 juin 2009 lui infligeant la sanction de la rétrogradation dans l'échelle barémique avec prise d'effet au 8 novembre 2008»;

Vu l'arrêt nº 199.073 du 18 décembre 2009 rejetant la demande de suspension de l’exécution de la même décision;

Vu la demande de poursuite de procédure de la partie requérante;

Vu le dossier administratif;

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport de M. P. HERBIGNAT, premier auditeur chef de section au Conseil d'Etat;

Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires;

XI – 18.406 - 1/12

Vu l'ordonnance du 24 janvier 2012, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 9 février 2012 à 9 heures 30;

Entendu, en son rapport, M. Ph. QUERTAINMONT, président de chambre;

Entendu, en leurs observations, Me P. MINSIER, loco Me M. UYTTENDAELE, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Mme J. BELDJOUDI, conseiller, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. P. HERBIGNAT, premier auditeur chef de section;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973 :

Considérant que les faits utiles à l’examen du recours se présentent comme suit :

  1. Le requérant a commencé sa carrière à la gendarmerie en août 1984 et a été nommé inspecteur principal de police le 1er avril 2001.

    Depuis le 1er mars 2007, il travaille au sein de la Police des chemins de fer, section Bruxelles, poste métro.

  2. Le 11 juillet 2006, le requérant se voit infliger une retenue de traitement pour conduite d'un véhicule sous influence de l'alcool.

  3. Le 5 mars 2007, le requérant a causé un accident de la circulation en état d'imprégnation alcoolique.

    La nuit du 25 au 26 mai 2007, le requérant s'absente de son poste de coordinateur à SPC Métro pendant sept heures pour se restaurer et consommer de l'alcool dans des établissements autour de son unité. Il réintègre ensuite celle-ci, où, sous l'influence de la boisson, il dort profondément jusqu'au briefing de fin de pause.

    Dans la même période, pendant son congé, le requérant est retrouvé inconscient par ses collègues, sous l'influence de la boisson, dans un établissement fréquenté par des prostituées.

  4. Suite à ces faits, un «contrat moral» est signé le 12 juillet 2007 entre le requérant, son chef de poste et le «stress team», par lequel il s'engage à rester sobre notamment en se faisant suivre par le «stress team» et en se rendant aux réunions organisées par

    XI – 18.406 - 2/12

    les Alcooliques anonymes. Le requérant s'engage également à reprendre une place au sein de son poste métro dans des tâches à caractère administratif afin qu'il ne soit plus en contact avec le public.

    Il est précisé que ce document ne peut pas servir à des fins disciplinaires sauf si le contrat moral n’est pas respecté. En outre, il est prévu qu'une évaluation aura lieu tous les trois mois et que les chefs lui apporteront leur soutien.

  5. Le 18 septembre 2007, le requérant cause un nouvel accident de la circulation avec dégâts matériels en état d'imprégnation alcoolique.

  6. Le 11 janvier 2008, la sanction disciplinaire lourde de la suspension par mesure disciplinaire d'une durée d'un mois est notifiée au requérant pour des faits de boisson en service qui ont eu lieu le 26 mai 2007. 7. Le 24 janvier 2008, le délégué de l'autorité disciplinaire supérieure du requérant reçoit notification d'un jugement du tribunal de police de Liège du 4 décembre 2007 condamnant le requérant, pour les faits qui ont eu lieu les 5 mars et 18 septembre 2007, au paiement d'une amende avec sursis, prononçant une déchéance du droit de conduire pour une durée de trois mois et subordonnant la réintégration dans le droit de conduire à la condition d'avoir réussi un examen médical et psychologique.

  7. Le 22 avril 2008, le directeur général de la Direction générale de la police administrative, (ci-après «DGA»), autorité disciplinaire supérieure du requérant, émet un rapport introductif aux termes duquel il envisage d'infliger au requérant la sanction disciplinaire lourde de la démission d'office.

    Le requérant introduit un mémoire, daté du 2 juin 2008, et est entendu oralement le 10 juin par le délégué de l'autorité disciplinaire supérieure.

    Le lendemain 11 juin, la DGA adopte la proposition de sanction lourde de la démission d'office.

  8. Le requérant introduit, le 20 juin 2008, une requête en reconsidération de la proposition de sanction lourde au conseil de discipline.

    Le 25 septembre 2008, le conseil de discipline émet l'avis, à la majorité des voix, que les faits sont établis et de nature à justifier, dans le chef du requérant, une mesure de rétrogradation.

  9. L'autorité disciplinaire supérieure décide de s'écarter de l'avis du conseil de discipline et en informe le requérant, qui transmet un mémoire complémentaire par lettre du 16 octobre 2008.

    XI – 18.406 - 3/12

    Le 22 octobre 2008, l'autorité disciplinaire supérieure inflige au requérant la sanction disciplinaire lourde de la démission d'office.

  10. Cette sanction est annulée par l’arrêt du Conseil d’Etat n° 193.335 du 15 mai 2009. L’arrêt déclare fondé le moyen pris de la violation du principe de proportionnalité et de l'erreur manifeste d'appréciation, pour les motifs suivants :

    Considérant que c'est au moment où elle statue que l'autorité disciplinaire doit apprécier la proportionnalité de la sanction disciplinaire qu'elle se propose d'infliger; qu'il lui appartient dès lors de tenir compte, non seulement du dossier disciplinaire, mais également du comportement de l'agent et de la manière dont il s'est amendé; que pour apprécier la persistance ou non du rapport de confiance nécessaire à la poursuite des activités de l'agent concerné, l'autorité disciplinaire doit tenir compte de l'ensemble de ses états de services, en ce compris ceux postérieurs aux faits reprochés; que le fait que le requérant ait été maintenu en fonction, même s'il ne constitue pas un obstacle au prononcé d'une sanction disciplinaire majeure, doit toutefois être pris en compte dans l'appréciation du rapport de proportionnalité; qu'après avoir considéré que la survenance des deux accidents sous imprégnation alcoolique n'était pas de nature à justifier une suspension préventive, la partie adverse ne peut raisonnablement considérer, par la suite, que seule une mesure de démission d'office pourrait sanctionner pareille faute, alors...

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