Décision judiciaire de Conseil d'État, 8 septembre 2010

Date de Résolution 8 septembre 2010
JuridictionXV
Nature Arrêt

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF

A R R Ê T

nº 207.243 du 8 septembre 2010

  1. 196.997/XV-1309

    En cause : FONTAINE Jean-Christophe, ayant élu domicile chez Me J. JURGA, avocat, rue Léon Mahieu 20 7350 Thulin,

    contre :

    l'État belge, représenté par le ministre de l’Intérieur. -----------------------------------------------------------------------------------------------------

    LE PRÉSIDENT DE LA XV e CHAMBRE DES RÉFÉRÉS,

    Vu la requête introduite le 2 juillet 2010 par Jean-Christophe Fontaine, en ce qu=elle tend à la suspension de l=exécution de la décision du ministre de l=Intérieur du 5 mai 2010 lui refusant l=octroi d=une carte d=identification d=agent de gardiennage;

    Vu la note d'observations et le dossier administratif;

    Vu le rapport de M. THIBAUT, premier auditeur au Conseil d'État;

    Vu l'ordonnance du 25 août 2010 fixant l'affaire à l'audience du 3 septembre 2010;

    Vu la notification aux parties du rapport et de l'avis de fixation à l'audience;

    Entendu, en son rapport, M. LEROY, président de chambre;

    Entendu, en leurs observations, Me M. PIED, loco Me J. JURGA, avocat, comparaissant pour la partie requérante et Mme A. HENRY, attaché, comparaissant pour la partie adverse;

    Entendu, en son avis conforme, M. THIBAUT, premier auditeur;

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    Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

    Considérant que les faits utiles à l=examen du recours se présentent comme suit:

    Une carte d=identification d=agent de gardiennage a été délivrée à Jean-Christophe Fontaine le 26 mai 2005 pour une durée de 5 ans. Elle est devenue caduque à la suite de la faillite de son employeur le 10 avril 2009.

    Le 1er juillet 2009, le requérant consent à l=enquête de sécurité prévue à l=article 7 de la loi du 10 avril 1990 relative à la sécurité privée et particulière. Le même jour, la société de gardiennage Securitas demande aux services du SPF Intérieur l=octroi d=une carte d=identification pour différentes personnes, dont le requérant, et elle joint des attestations de réussite de différentes formations pour le personnel d=exécution des entreprises de gardiennage et des services internes de gardiennage ainsi qu=un extrait de casier judiciaire ne mentionnant aucune condamnation. Le 2 juillet, la société de gardiennage Be Security demande aux services du SPF une carte d=identification pour le requérant et elle joint les différents documents requis.

    Les 9 et 27 juillet, les services de la partie adverse demandent à la police fédérale l=exécution d=une enquête relative aux conditions de sécurité du requérant. Le 29 juillet, un inspecteur de la police fédérale détaché auprès des services de la partie adverse demande au procureur du Roi de Dinant l=autorisation d=obtenir copie d=un procès-verbal établi le 11 août 2007 à la charge du requérant dans une affaire *armes et munitions+ ainsi que la communication d=éventuelles informations à caractère judiciaire en possession de ces autorités. Le 7 septembre, ce procureur transmet la copie du procès-verbal et indique que l=affaire a été classée sans suite, *les poursuites ne paraissant plus prioritaires dès lors que (le requérant) a fait abandon volontaire de l=arme prohibée saisie sur lui+. Le 7 octobre, l=inspecteur de police établit un rapport d=enquête sur les conditions de sécurité relatives au requérant. Ce rapport met en exergue le procès-verbal de 2007 et relève que, à l=occasion d=un contrôle de véhicules, le requérant a été trouvé en possession d=une matraque télescopique d=une longueur totale de 53 cm qui a été saisie et dont le requérant a fait abandon. Le 13 octobre, la commission *enquête sur les conditions de sécurité+ instituée au sein du SPF Intérieur estime que le requérant ne satisfait pas aux conditions de sécurité et qu=une procédure de refus de carte d=identification doit être mise en œuvre. Le 21 décembre, les services du SPF informent le requérant que

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    le ministre envisage de lui refuser la carte en raison de l=existence du procès-verbal de 2007 et lui signalent qu’il peut accéder au dossier administratif et communiquer ses moyens de défense. Le 21 janvier 2010, le conseil du requérant fait part de ses observations à propos du courrier du 21 décembre, tenant pour l=essentiel à la qualification de la détention de la matraque comme manquement grave à la déontologie professionnelle ou constitutive d=une contre-indication, et il expose que la détention de la matraque s=inscrivait dans un cadre particulier, à savoir des rondes de nuit autour d=un magasin dans une zone périlleuse.

    Le 5 mai 2010, la ministre de l=Intérieur prend la décision attaquée, dont la motivation est la suivante:

    *(Y) Vous avez été détenteur d=une carte d=identification d=agent de gardiennage délivrée pour l=entreprise Bunker Training Center SA valable du 26 mai 2005 au 26 mai 2010. En raison de la faillite de cette entreprise, j=ai procédé au retrait de l=autorisation ministérielle de celle-ci, par mon arrêté ministériel du 10 novembre 2009, ayant pris ses effets le 22 juin 2009, jour de l=ouverture de faillite sur aveu. Depuis cette date, votre précédente carte d=identification n=est donc plus valable.

    Les entreprises de gardiennage BE Security sprl et Securitas sa ont introduit pour vous en date des 2 et 3 juillet 2009 une demande de carte d=identification d=agent de gardiennage.

    Je vous rappelle que l=article 6, alinéa 1er, 8E, de la loi précitée stipule que les personnes qui exercent une fonction d=exécution au sein d=une entreprise de gardiennage doivent satisfaire aux conditions de sécurité nécessaires à l=exercice d=une fonction d=exécution et ne pas avoir commis des faits qui, même s=ils n=ont pas fait l=objet d=une condamnation pénale, portent atteinte à la confiance en l=intéressé, parce qu=ils constituent un manquement grave à la déontologie professionnelle ou une contre-indication au profil souhaité, tel que visé à l=article 7, ' 1erbis.

    La vérification des conditions de sécurité est faite sur base d=une enquête relative aux conditions de sécurité.

    Vous avez consenti à la réalisation d=une telle enquête en date du 29 juin 2009. Une enquête a dès lors été effectuée par les services de police et a révélé, dans votre chef, un certain nombre de renseignements de nature judiciaire et administrative et/ou des données professionnelles qui sont importants dans le cadre de l=appréciation des conditions de sécurité visées à l=article 6, alinéa 1er, 8E, de la loi précitée. Ces renseignements font l=objet du rapport de l=officier de police en charge de cette enquête.

    Le rapport d=enquête fait état du procès-verbal DI.36.L3.002558/2007 concernant des faits de port illégal d=arme prohibée.

    Sur la base de ce rapport, la Commission Aenquête sur les conditions de sécurité@ a émis son avis le 13 novembre 2009. Elle a estimé que vous ne satisfaisiez pas aux conditions de sécurité et qu=une procédure visant au refus de la délivrance de votre carte d=identification devait être initiée.

    Vous avez été mis au courant de ces faits et de l=éventualité d=un refus d=octroi de votre carte d=identification d=agent de gardiennage par un courrier recommandé du 21 décembre 2009. Vous avez été informé que vous pouviez, durant toutes les phases de la procédure, vous faire assister par un conseil de votre choix. Il a également été porté à votre connaissance que vous disposiez, d=une part, d=un délai de 15 jours ouvrables à compter de la date de réception de cette lettre pour prendre connaissance de votre dossier et en recevoir une

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    copie et, d=autre part, d=un délai de 40 jours ouvrables pour faire valoir vos moyens de défense par courrier recommandé à la poste.

    Vous avez consulté et obtenu une copie gratuite de votre dossier le 25 janvier 2010.

    Par son courrier du 21 janvier 2010, réceptionné le 22 janvier 2010, votre conseil nous a fait parvenir vos moyens de défense.

    Les interventions des entreprises de gardiennage et de leur personnel ont un rapport étroit avec l=ordre public et sont, dès lors, particulièrement délicates.

    Le législateur a par conséquent tenu à s=assurer que les personnes qui exercent des activités de gardiennage B activités qui sont traditionnellement du ressort d=autorités publiques B soient des individus dignes de confiance.

    À cette fin, il a posé la condition d=exercice suivante pour le personnel d=exécution des entreprises de gardiennage, à savoir: Asatisfaire aux conditions de sécurité nécessaires à l=exercice d=une fonction d=exécution et ne pas avoir commis de faits qui, même s=ils n=ont pas fait l=objet d=une condamnation pénale, portent atteinte à la confiance en l=intéressé, parce qu=ils constituent un manquement grave à la déontologie professionnelle ou une contre-indication au profil souhaité tel que visé à l=article 7, ' 1erbis@ (article 6, alinéa 1er, 8E, de la loi du 10 avril 1990 réglementant la sécurité privée et particulière).

    Sont donc également visés les faits qui, pour un citoyen, ne sont peut-être pas si graves et n=ont dès lors pas été sanctionnés par un juge pénal, mais qui revêtent de l=importance pour une personne active dans le secteur du gardiennage.

    Il ressort également de cet article qu=il doit être vérifié, pour chaque agent de gardiennage, qu=il présente le profil requis pour travailler dans ce secteur.

    Ledit profil défini à l=article 7, ' 1erbis de la loi est caractérisé par: 1E le respect pour les droits fondamentaux des concitoyens; 2E intégrité; 3E une capacité à faire face à un comportement agressif de la part de tiers et à se maîtriser dans de telles situations;

    4E absence des liens suspects avec le milieu criminel.

    Le...

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