17 JUILLET 2022. - Arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 28 mars 1969 dressant la liste des maladies professionnelles donnant lieu à réparation et fixant les critères auxquels doit répondre l'exposition au risque professionnel pour certaines d'entre elles

RAPPORT AU ROI

Sire,

J'ai l'honneur de soumettre à la signature de Votre Majesté un arrêté royal modifiant l'arrêté royal du 28 mars 1969 dressant la liste des maladies professionnelles donnant lieu à réparation et fixant les critères auxquels doit répondre l'exposition au risque professionnel pour certaines d'entre elles.

Le Conseil d'Etat a émis le 28 juin 2022 l'avis n° 71.594/1, en application de l'article 84, § 3, alinéa 1er, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973. Le texte a été adapté en tenant compte des remarques du Conseil d'Etat et les autres questions sont clarifiées dans ce rapport.

Exposé des motifs

  1. Introduction

    L'objectif est d'ajouter trois maladies à la liste des maladies professionnelles : le cancer de l'ovaire provoqué par l'amiante, la sclérose systémique provoquée par l'inhalation de poussières renfermant de la silice cristalline et le mélanome uvéal consécutif à l'exposition aux rayonnements ultraviolets.

    L'ajout d'une maladie sur la liste des maladies professionnelles est très important car il facilite la charge de la preuve pour les personnes touchées.

    Il était bien entendu possible, avant l'entrée en vigueur de cet arrêté royal, de voir l'une de ces 3 maladies reconnues au titre de maladie professionnelle sur pied de l'article 30bis des lois coordonnées mais la charge de la preuve était alors plus lourde pour la victime qui devait établir que la maladie trouvait sa cause effective dans l'exercice de l'activité professionnelle. En inscrivant une maladie sur la liste et en définissant ses critères d'exposition, une fois démontrées l'existence de la maladie et que les critères d'exposition au risque professionnel de contracter celle-ci sont réunis, il sera présumé, de manière irréfragable que l'exposition est la cause de la maladie dans le cas d'espèce. Il s'agit donc d'un arrêté royal qui permettra d'alléger la charge probatoire pesant sur ces personnes et forcément également d'accélérer le traitement de leur demande et donc le paiement de leur indemnité si la maladie est reconnue.

    Trois nouvelles maladies sous trois nouveaux codes (codes 9.311 " Cancer de l'ovaire provoqué par l'amiante ", 9.312 " Sclérose systémique provoquée par l'inhalation de poussière renfermant de la silice cristalline " et 1.609 "Mélanome uvéal causé par le rayonnement optique provenant du soudage ") sont donc insérées dans la liste des maladies professionnelles donnant lieu à indemnisation. Par ailleurs, l'annexe à l'arrêté est modifiée afin de déterminer dans quelles conditions l'intéressé est considéré avoir été exposé au risque professionnel.

    Les maladies professionnelles sont des maladies intimement liées à l'exercice d'une profession, ce qui crée un risque professionnel. Un risque professionnel existe lorsque l'exposition à une influence nocive va de pair avec l'exercice de la profession et est nettement plus importante que l'exposition subie par la population générale et constitue, selon les connaissances médicales généralement admises, la cause principale de la maladie.

    C'est pourquoi pour certaines maladies, qui peuvent être également contractées dans d'autres contextes, relevant notamment de la sphère privée, les critères d'exposition afin de pouvoir les faire rentrer dans le champ d'indemnisation des maladies professionnelles doivent impérativement être déterminés.

    Ces critères d'exposition sont définis après examen par la commission médicale adéquate au sein de Fedris, puis le Conseil scientifique de l'institution se prononce et transmet un avis, qui est examiné par le comité de gestion des maladies professionnelles. Ces critères font donc l'objet d'un examen approfondi tant sur le plan médical et scientifique que juridique.

  2. Formalités obligatoires

    En réponse à l'interrogation du Conseil d'Etat concernant les formalités obligatoires et leur actualisation, telle que formulée au point 4, on peut signaler ce qui suit.

    Concernant le cancer de l'ovaire lié à l'amiante en particulier, le Conseil Scientifique a eu l'occasion de confirmer son avis lors de la séance du 25 janvier 2022 à l'occasion du débat parlementaire sur l'introduction du cancer de l'ovaire dans la liste des maladies indemnisées par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante. Une revue critique de la littérature scientifique, publiée sur le sujet entre 2014 et 2021, a été réalisée afin de remettre à jour l'étude présentée en janvier 2016. Lors de la séance du 25 janvier 2022, le Conseil Scientifique a pris connaissance de cette mise à jour et a constaté qu'il n'y avait pas d'arguments nouveaux qui conduiraient à modifier le précédent avis.

    Concernant les deux autres pathologies, depuis les avis initiaux, les commissions médicales qui avaient été chargées de réaliser les études préparatoires des avis du conseil scientifique n'ont pas jugé nécessaire de soumettre au conseil scientifique de nouveaux éléments de preuves scientifiques susceptibles de modifier la position du Conseil, notamment sur les critères établis. La veille scientifique étant une des missions des commissions médicales au sein de Fedris, on peut considérer que les avis initiaux sont donc toujours pertinents.

    Autrement dit et de manière générale, dans le cadre d'études scientifiques, et surtout si elles concernent des maladies rares, il n'est pas étonnant qu'au fil des ans, aucune étude scientifique ne soit publiée pour réfuter les opinions émises quelques années plus tôt, que ce soit en termes de recherche ou de traitement.

    Par ailleurs, lorsque dans le cadre de la définition du risque professionnel on se réfère aux connaissances médicales " généralement " admises, cet adverbe traduit précisément l'impossibilité d'obtenir, au niveau scientifique, une certitude absolue sur le long terme : les connaissances médicales généralement admises représentent l'ensemble de données sur lesquelles il existe, à un moment donné, un consensus le plus large possible dans le monde scientifique, sans que cela induise nécessairement l'absence de positions discordantes et l'absence d'évolutions possibles ultérieures.

    En résumé, dans le cadre de l'ajout d'une maladie sur la liste et de la fixation de critères d'exposition au risque professionnel, il est rare, voire impossible, de parvenir à une unanimité de toutes les études scientifiques et que par ailleurs cette unanimité persiste. Dès lors que le Conseil scientifique se prononce sur l'ajout d'une maladie et sur ses critères d'exposition, le consensus est suffisant pour justifier l'inscription de cette maladie sur la liste et la fixation de conditions d'exposition au risque professionnel.

  3. La suite de ce rapport aborde les trois maladies spécifiquement.

    3.1. Concernant le cancer de l'ovaire provoqué par l'amiante

    La Commission médicale " Cancers professionnels " de Fedris, a proposé d'ajouter la maladie professionnelle à la liste des maladies professionnelles dans le groupe 1.6 - maladies provoquées par des agents physiques:

    " 9.311 - Cancer de l'ovaire provoqué par l'amiante".

    Elle a fait une proposition de critères de reconnaissance du cancer de l'ovaire provoqué par l'amiante qui sont repris dans l'annexe à cet arrêté royal, à savoir une durée minimale d'exposition nécessaire pour atteindre un risque relatif égal ou supérieur à 2, de 10 ans, à temps plein, dans une ou plusieurs des conditions ou professions définies. Ces critères ont été définis sur base de différentes analyses concernant notamment le risque relatif de contracter la maladie et les conditions d'exposition professionnelle.

    3.2. Concernant la sclérose systémique provoquée par l'inhalation de silice cristalline

    Sur avis de la Commission médicale " Affections respiratoires ", il est proposé d'ajouter la maladie professionnelle suivante à la liste des maladies professionnelles dans le groupe 1.3 - Maladies professionnelles provoquées par l'inhalation de substances et agents non compris sous d'autres positions :

    " 9.312 - Sclérose systémique provoquée par l'inhalation de poussières renfermant de la silice cristalline".

    Concernant la durée d'exposition, il y a peu d'études dans la littérature scientifique. Le Conseil Scientifique a proposé d'adopter la durée minimale d'exposition exigée dans le tableau français, à savoir 10 ans à temps plein.

    Cependant, certaines études montrent qu'exceptionnellement, si l'intensité est particulièrement élevée, une durée d'exposition inférieure à 10 ans peut mener au développement de la maladie. De plus, dans le cas d'une silicose avérée (CT-scan haute résolution, histologie), reconnue comme maladie professionnelle, aucune durée minimale d'exposition n'est exigée.

    C'est pourquoi, l'arrêté royal précise que si la condition principale n'est pas remplie, l'exposition au risque professionnel pourra être reconnue en cas d'exposition...

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