16 JANVIER 2022. - Arrêté royal concernant l'enregistrement et la répartition des officines ouvertes au public, et abrogeant les arrêtés royaux du 25 septembre 1974 concernant l'ouverture, le transfert et la fusion d'officines pharmaceutiques ouvertes au public et du 21 septembre 2004 relatif au transfert d'une officine ouverte au public vers un bâtiment d'un aéroport

RAPPORT AU ROI

Sire,

Le projet d'arrêté que nous avons l'honneur de soumettre à Votre Majesté, vise à mettre en oeuvre le chapitre 8 de la loi du 30 octobre 2018 portant des dispositions diverses en matière santé, qui modifie les règles concernant l'ouverture, le transfert et la fusion d'officines pharmaceutiques, telles qu'elles figurent dans la loi relative à l'exercice des professions des soins de santé, coordonnée le 10 mai 2015.

L'arrêté remplace l'arrêté royal du 25 septembre 1974 concernant l'ouverture, le transfert et la fusion d'officines pharmaceutiques ouvertes au public, ainsi que l'arrêté royal du 21 septembre 2004 relatif au transfert d'une officine ouverte au public vers un bâtiment d'un aéroport.

Dans les grandes lignes, l'arrêté prévoit les adaptations suivantes au régime de répartition des pharmacies ouvertes au public :

- La suppression de la Commission d'implantation et l'introduction d'une consultation publique préalable à la décision ;

- l'introduction de la possibilité, en cas de fusion, de transférer la pharmacie restante, sous certaines conditions ;

- réduire la durée de la fermeture temporaire d'une pharmacie ;

- l'introduction, en cas d'ouverture ou de transfert d'une pharmacie, d'une inspection préalable ;

- la possibilité d'autoriser une parcelle adjacente et non adjacente à exercer certaines activités pharmaceutiques ;

- l'introduction d'une méthode mathématique d'évaluation des demandes de transfert dans la proximité immédiate ;

- la simplification des critères démographiques ;

- l'introduction de la possibilité d'autoriser au moins une pharmacie dans chaque commune.

Le présent rapport répond à la demande explicite du Conseil d'Etat, dans son avis n° 70.421/2 du 29 novembre 2021, de clarifier certains aspects de l'arrêté dans un Rapport au Roi. En revanche, ce rapport vise à mettre en évidence les points sur lesquels l'avis du Conseil d'Etat ne peut être suivi et à en expliquer les raisons.

La majorité des observations du Conseil d'Etat ont toutefois été suivies.

  1. Précisions particulières à la demande du Conseil d'Etat

    Les règles de répartition contenues dans le projet d'arrêté royal ne peuvent être considérées comme contraires à l'article 49 du TFUE et à l'arrêt de la Cour de justice du 1er juin 2010 dans l'affaire Blanco Perez et Chao Gomez.

    Nonobstant le fait que le projet de règlementation de répartition des pharmacies constitue clairement une restriction à la liberté d'établissement prévue à l'article 49 TFUE, cette restriction peut être justifiée.

    Dans l'arrêt précité la Cour a jugé qu'un Etat membre peut adopter une réglementation qui prévoit qu'une seule pharmacie peut être créée par rapport à un certain nombre d'habitants. En effet, une telle condition peut avoir pour effet de canaliser l'implantation de pharmacies vers des parties du territoire national où l'accès au service pharmaceutique est lacunaire puisque, en empêchant les pharmaciens de s'implanter dans des zones déjà pourvues d'un nombre suffisant de pharmacies, elle les invite ainsi à s'installer dans des zones dans lesquelles il existe une pénurie de pharmacies.

    Il s'ensuit que ladite condition est susceptible de répartir les pharmacies d'une manière équilibrée sur le territoire national, d'assurer ainsi à l'ensemble de la population un accès approprié au service pharmaceutique, et, par conséquent, d'augmenter la sûreté et la qualité de l'approvisionnement de la population en médicaments.

    La seule condition liée nombre d'habitants risque de ne pas permettre d'éviter une concentration des pharmacies, au sein d'une zone géographique déterminée selon cette condition, dans certaines localités attractives de cette zone. Or, une telle concentration de pharmacies pourrait aboutir à la création de structures faisant double emploi, alors que d'autres parties de la même zone pourraient souffrir d'une pénurie de pharmacies. Dans ces circonstances, la Cour a jugé qu'il est loisible à un Etat membre de prévoir des conditions supplémentaires qui viseraient à empêcher cette concentration, en adoptant, par exemple, une condition qui impose des distances minimales entre les pharmacies, comme c'est le cas dans le présent arrêté. Cette condition permet d'éviter une telle concentration par sa nature même, et elle est ainsi susceptible de répartir les pharmacies d'une manière plus équilibrée au sein d'une zone géographique déterminée. La condition liée à la distance minimale accroît aussi, par voie de conséquence, la certitude des patients qu'ils disposeront d'une pharmacie à proximité, et, par conséquent, qu'ils disposeront d'un accès facile et rapide au service pharmaceutique approprié. L'imposition de distances minimales conduit donc à la fois à une meilleure répartition des pharmacies et à une plus grande proximité pour les patients, ce qui est bénéfique pour la santé publique.

    Les règles de distribution énoncées dans le présent arrêté s'inscrivent dans ce cadre et sont jugées nécessaires et proportionnées afin de garantir un approvisionnement en médicaments de la population sûr et de qualité. Cet objectif est considéré par la Cour dans l'arrêt précité comme justifiant la restriction à la liberté d'établissement.

    Toutefois, il ressort également de l'arrêt que l'article 49 TFUE s'oppose à une réglementation nationale qui impose des restrictions à la création de nouvelles pharmacies par référence à des critères démographiques et géographiques, dans la mesure où l'application de ces critères empêche « dans toute zone géographique ayant des caractéristiques démographiques particulières, la création d'un nombre suffisant de pharmacies susceptibles d'assurer un service pharmaceutique approprié ».

    Les règles de répartition fixées par l'arrêté royal garantissent l'implantation d'un nombre suffisant de pharmacies dans toutes les zones géographiques présentant des caractéristiques démographiques particulières. En particulier, l'article 8, § 2 (dans la version du texte soumise au Conseil d'Etat : l'article 23, § 2), prévoit qu'une seule pharmacie peut se voir accorder une autorisation d'implantation dans une commune, même si cette commune compte moins de 5.000 habitants et que l'application des règles contenues dans l'article 8, § 1er, alinéa 1er, 1° (dans la version du texte soumise au Conseil d'Etat : l'article 23, § 1, alinéa 1er, 1° ), iuncto alinéa 3, aurait pour conséquence qu'aucune pharmacie ne pourrait être ouverte dans une telle commune.

    La raison pour laquelle les critères d'ouverture d'une nouvelle officine (article 8 ; dans la version du texte soumise au Conseil d'Etat : l'article 23 sont plus stricts que les critères de transfert d'une pharmacie vers un nouvel emplacement (article 10 dans la version du texte soumise au Conseil d'Etat : l'article 25 est le grand nombre de pharmacies en Belgique par rapport à la moyenne européenne. Il est donc souhaitable que les écarts par rapport au nombre maximal de pharmacies autorisées dans une commune ne soient pas résolus par l'ouverture d'une nouvelle pharmacie, mais par le transfert d'une pharmacie existante d'une zone où il y a surconcentration, comme les centres-villes. Il devrait en résulter une meilleure accessibilité pour la population et une amélioration de l'habitabilité des officines existantes, ce qui, à terme, contribuera également à la qualité des soins pharmaceutiques offerts.

    Compte tenu du nombre considérable de pharmacies dans notre pays, l'arrêté vise également à encourager les pharmacies à fusionner. A cet effet, l'officine fusionnée bénéficie d'un périmètre de protection pendant dix ans, dont la taille dépend du nombre d'habitants de la commune.

    Les pharmacies transférées bénéficient d'ailleurs également d'un périmètre de protection (de 1500 mètres) pendant une période de deux ans, afin d'éviter, par exemple, que la création d'un nouveau lotissement n'entraîne une surconcentration de pharmacies.

    L'apparente contradiction entre l'article 8 (ancien article 23), § 1, premier alinéa, 1° (l'ouverture d'une nouvelle pharmacie dans une commune ne peut conduire à un nombre de pharmacies > chiffre de la population/5000) et l'article 9 (ancien article 24), 2° (une fusion ne peut conduire à un nombre de pharmacies

    La suppression des commissions d'implantation, qui n'ont qu'un rôle consultatif, s'inscrit dans le cadre d'une plus grande sécurité juridique. Les règles de répartition prévues par l'arrêté royal du 25 septembre 1974 relatif à l'ouverture, au transfert et à la fusion des pharmacies ouvertes au public laissent une grande marge d'appréciation. Dans les cas où la commission d'implantation fait usage de son pouvoir d'appréciation, on constate que les décisions ministérielles fondées sur l'avis de la commission sont souvent contestées devant le Conseil d'Etat. Une description plus précise et sans ambiguïté des règles de répartition, qui est l'un des objectifs du projet actuel, supprime la raison d'être des commissions d'implantation. Il en va de même pour la suppression de l'obligation de demander l'avis de divers organes externes : la valeur ajoutée de ces conseils disparaît avec les règles de répartition strictement définies.

  2. Prise en compte de l'avis du Conseil d'Etat

    Sur un certain nombre de points, l'avis du Conseil d'Etat n'a pas pu être suivi, ou seulement partiellement, ou la manière dont cet avis a été pris en compte nécessite quelques explications.

    Le commentaire de l'Autorité de protection des données selon lequel il n'existe pas de cadre juridique suffisant pour le traitement des données à caractère personnel lié au cadastre et à la base de données CoBRHA, est noté.

    Le Conseil d'Etat répète cette remarque, mais elle ne peut être suivie en ce qui concerne la base de données CoBRHA. Cette base de données fait partie du système de gestion des utilisateurs et des accès que la plate-forme eHealth doit mettre en place conformément à l'article 5, 4. de la loi du 21 août 2008 relative à l'institution et à l'organisation de la plate-forme eHealth...

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