11 FEVRIER 2019. - Arrêté royal fixant les conditions de l'action positive

RAPPORT AU ROI

Sire,

L'action positive est une exception à l'interdiction de discrimination. Dans le cas des mesures d'action positive, l'égalité de traitement peut céder la place à un objectif social plus élevé, principalement l'élimination de l'exclusion sociale. Les actions positives s'entendent alors comme les mesures visant un groupe "défavorisé", dont les membres sont porteurs d'un critère protégé bien défini et qui ont pour objectif de réduire, d'éliminer ou de compenser les désavantages subis par le groupe et en lien avec le critère protégé, de sorte que ce groupe puisse participer pleinement au processus de travail. Les mesures d'action positive visent donc à obtenir une répartition plus équilibrée entre les membres des différents groupes de population.

L'article 7.1. de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail dispose que pour assurer la pleine égalité dans la vie professionnelle, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un Etat membre de maintenir ou d'adopter des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser des désavantages liés à l'un des motifs visés à l'article 1er.

Le considérant 26 de cette même directive dispose que l'interdiction de la discrimination doit se faire sans préjudice du maintien ou de l'adoption de mesures destinées à prévenir ou à compenser des désavantages chez un groupe de personnes d'une religion ou de convictions, d'un handicap, d'un âge ou d'une orientation sexuelle donnés, et ces mesures peuvent autoriser l'existence d'organisations de personnes d'une religion ou de convictions, d'un handicap, d'un âge ou d'une orientation sexuelle donnés lorsque leur objet principal est la promotion des besoins spécifiques de ces personnes.

L'article 5 de la directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe de l'égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique dit la même chose en ce qui concerne les mesures destinées à prévenir ou à compenser des désavantages d'un groupe de personnes d'une race spécifique ou d'une origine ethnique spécifique ainsi que l'article 6 de la directive 2004/113/CE du Conseil du 13 décembre 2004 mettant en oeuvre le principe de l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l'accès à des biens et services et la fourniture de biens et services en ce qui concerne les mesures destinées à prévenir ou à compenser des désavantages liés au sexe.

Ces mesures européennes ont été transposées en droit belge. L'article 10 de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination dispose qu'une distinction directe ou indirecte fondée sur l'un des critères protégés ne s'analyse pas en une quelconque forme de discrimination, lorsque cette distinction directe ou indirecte constitue une mesure d'action positive. Une mesure d'action positive ne peut être mise en oeuvre que moyennant le respect des conditions suivantes (1) il doit exister une inégalité manifeste; (2) la disparition de cette inégalité doit être désignée comme un objectif à promouvoir; (3) la mesure d'action positive doit être de nature temporaire, étant de nature à disparaître dès que l'objectif visé est atteint; (4) la mesure d'action positive ne doit pas restreindre inutilement les droits d'autrui. Dans le respect de ces conditions, le Roi, par arrêté délibéré en Conseil des ministres, détermine les hypothèses et les conditions dans lesquelles une mesure d'action positive peut être mise en oeuvre. Dans le domaine des relations de travail et des régimes complémentaires de sécurité sociale, ces arrêtés royaux sont adoptés pour ce qui concerne le secteur privé, après consultation du Conseil national du Travail.

Une disposition identique a également été intégrée dans l'article 10 de la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie et dans l'article 16 de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes.

Le présent arrêté exécute ces articles des trois lois fédérales anti-discrimination.

Commentaire des articles

Article 1er

Cet article définit le champ d'application de l'arrêté royal. L'arrêté ne s'applique qu'au secteur privé.

Article 2

Cet article donne un aperçu des définitions qui sont mobilisées dans l'arrêté.

Article 3

Cet article reprend la définition des actions positives, telle que prévue dans les lois anti-discrimination. Les actions positives sont décrites comme des mesures spécifiques destinées à prévenir ou à compenser les désavantages liés aux critères protégés en vue de garantir une pleine égalité dans la pratique.

Les critères protégés sont également ceux qui sont repris dans les lois anti-discrimination, à savoir l'âge, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, la conviction religieuse ou philosophique, la conviction politique, la conviction syndicale, la langue, l'état de santé actuel ou futur, un handicap, une caractéristique physique ou génétique, l'origine sociale, la nationalité, une prétendue race, la couleur de peau, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique et le sexe.

Article 4

Les mesures d'action positives sont élaborées via soit une convention collective de travail, soit un acte d'adhésion fixant les conditions relatives aux actions positives.

Article 5

L'article 4 décrit la procédure d'établissement de cet acte d'adhésion. Cette procédure est identique à celle appliquée à la rédaction et à la modification du règlement du travail - en cas d'absence de conseil d'entreprise - telle que définie à l'article 12 de la loi du 8 avril 1965 instituant les règlements du travail, ainsi à celle appliquée lorsque les avantages non récurrents liés aux résultats sont introduits par voie d'acte d'adhésion, telle que définie à l'article 7 de la loi du 21 décembre 2007 relative à l'exécution de l'accord interprofessionnel 2007-2008.

Article 6

Cet article détermine le contenu du plan d'action positive, indépendamment du fait qu'il prenne la forme d'une convention collective de travail ou d'un acte d'adhésion fixant les conditions relatives aux actions positives..

Il faut tout d'abord qu'il existe une inégalité manifeste entre les personnes du groupe cible visé, porteuses d'un critère protégé et les autres personnes qui ne sont pas porteuses de ce même critère.

L'inégalité entre les deux groupes doit donc être évidente et incontestable. Il revient toutefois à l'entreprise ou au secteur de démontrer cette inégalité. Tous les moyens et données peuvent être utilisés à cet effet.

En outre, l'objectif doit être clairement défini, ainsi que la manière dont l'action positive sera élaborée. La condition est toutefois de poursuivre la disparition de l'inégalité par l'élimination ou la réduction des problèmes qui sous-tendent l'inégalité.

Les actions positives peuvent prendre différentes formes.

Ci-après quelques exemples-types à des fins de clarification. Ces exemples ne sont pas...

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