Décision judiciaire de Raad van State, 23 novembre 1999

Date de Résolution23 novembre 1999
JuridictionNietigverklaring
Nature Arrest

CONSEIL D'ETAT, SECTION D'ADMINISTRATION.

A R R E T no 83.584 du 23 novembre 1999

  1. 76.536/XI-3779

    En cause :

    L'A.S.B.L. Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie (MRAX), ayant élu domicile chez Me I. de VIRON, avocat, rue des Coteaux 41

    1210

    Bruxelles, contre :

    1. l'Etat belge , représenté par le Ministre de l'Intérieur,

    2. l'Etat belge , représenté par le Ministre de la Justice.

      LE CONSEIL D'ETAT, XIe CHAMBRE,

      Vu la requête introduite le 28 novembre 1997 par l'A.S.B.L. Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie (MRAX), qui demande l'annulation de "la circulaire du 28.8.1997 relative à la procédure de publi- cation des bans de mariage et aux documents qui doivent être produits afin d'obtenir un visa en vue de conclure un mariage dans le Royaume ou d'obtenir un visa de regroupe- ment familial sur la base d'un mariage conclu à l'étran- ger, publiée au Moniteur belge le 1.10.1997";

      Vu les mémoires en réponse et en réplique réguliè- rement échangés;

      Vu le rapport de M. GILLIAUX, premier auditeur au Conseil d'Etat;Vu l'ordonnance du 2 février 1999 ordonnant le dépôt au greffe du dossier et du rapport;

      Vu la notification du rapport aux parties et les derniers mémoires;

      Vu l'ordonnance du 28 avril 1999, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 20 mai 1999;

      Entendu, en son rapport,

      Mme WILLOT-THOMAS, président de chambre;

      Entendu, en leurs observations, Me I. de VIRON, avocat, comparaissant pour la partie requérante, et Me E.

      DERRIKS, avocat, comparaissant pour les parties adverses;

      Entendu, en son avis conforme,

      M.GILLIAUX, premier auditeur;

      Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

      Considérant que le 28 août 1997, le Ministre de l'Intérieur et le Ministre de la Justice ont pris une circulaire relative à la procédure de publication des bans de mariage et aux documents qui doivent être produits afin d'obtenir un visa en vue de conclure un mariage dans le Royaume ou d'obtenir un visa de regroupement familial sur la base d'un mariage conclu à l'étranger;

      que cette circulaire, qui est adressée aux Bourgmestres et officiers de l'Etat civil, a été publiée au Moniteur belge du 1er octobre 1997; qu'il s'agit de l'acte attaqué;

      Considérant qu'il ressort toutefois des moyens que la requête n'est dirigée que contre les points 4 et 6 de la circulaire précitée portant notamment ce qui suit : "

    3. Introduction de la demande de séjour après la célébration du mariage(...) en ce qui concerne le séjour, il convient de rappeler que les documents requis pour l'entrée dans le Royaume doivent être produits à l'appui de la demande de séjour introduite dans le cadre de l'arti- cle 10, alinéa 1er, 1° ou 4°, ou de l'article 40, §§

      3 à 6, de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloigne- ment des étrangers.

      Cela signifie concrètement que l'étranger doit être en possession d'un passeport national valable ou d'un titre de voyage en tenant lieu, revêtu le cas échéant d'un visa ou d'une autorisation tenant lieu de visa, valable pour la Belgique, apposé par un repré- sentant diplomatique ou consulaire belge ou par celui d'un Etat partie à une Convention internationale relative au franchissement des frontières extérieures, liant la Belgique (article 2 de la loi du 15 décembre 1980).

      Lorsque l'étranger ne produit pas ces documents d'entrée, sa demande de séjour est en principe décla- rée irrecevable. (...)

    4. Documents qui doivent être produits afin d'obtenir un visa de regroupement familial sur la base d'un mariage conclu à l'étranger.

  2. Regroupement familial sur la base de l'article 10, alinéa 1er, 1° ou 4°, de la loi du 15 décembre 1980. (...)

    2) dans le cadre de l'article 10, alinéa 1er, 1° de la loi (application des conventions bilatérales relatives à l'emploi en Belgique de travailleurs étrangers, conclues entre la Belgique et le Maroc, la Turquie, la Tunisie, l'Algérie et la Yougoslavie, approuvées par la loi du 13 décembre 1976 - M.B., 17 juin 1977) : (...) - la preuve que le conjoint en Belgique y est occupé (attestation de l'employeur, contrat de travail, inscription au registre de commerce, ...);

    - une copie du permis de travail ou de la carte professionnelle du conjoint en Belgi- que;- la preuve que le conjoint en Belgique y a travaillé pendant trois mois au moins (un mois pour les Turcs).";

    que l'association requérante ne critique le dernier alinéa du point 4 relatif à l'irrecevabilité de la demande de séjour qu'en tant qu'il concerne les étrangers visés à l'article 40 §§ 3 à 6 de la loi, l'irrecevabilité de la demande de séjour des étrangers visés à l'article 10, alinéa 1er, 1° ou 4° étant expressément prévue par l'ar- ticle 26 § 2 de l'arrêté royal du 8 octobre 1981, lorsque l'étranger ne produit pas les documents prévus par l'ar- ticle 12bis de la loi précitée, c'est-à-dire, notamment, les documents requis pour son entrée;

    Considérant qu'observant que la partie requérante joint à son recours un extrait d'un procès-verbal de son bureau du 30 octobre 1997 aux termes duquel celui-ci "donne mandat à la Commission juridique pour un recours au Conseil d'Etat à propos de la circulaire publiée au Moniteur belge du 1er octobre 1997 sur les mariages concernant les étrangers", les parties adverses soutien- nent que cette délégation n'est pas conforme à l'article 13 des statuts de l'association requérante qui n'habilite que le Conseil d'administration à déléguer ses pouvoirs de prendre des décisions en la matière; qu'elles concluent que la décision d'agir n'a pas été valablement prise; que l'Etat belge ajoute qu'il n'est pas établi que le MRAX a respecté les conditions que la loi du 27 juin 1921 sur les associations sans but lucratif impose à celles-ci pour pouvoir acquérir et opposer aux tiers leur personnalité civile, notamment, la publication des modifications à la liste des administrateurs, le dépôt au greffe de la liste des membres et des modifications y apportées annuellement;

    Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi du 27 juin 1921 accordant la personnalité civile aux associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité publique, " le Conseil d'administration gère lesaffaires de l'association et la représente dans tous les actes judiciaires et extra-judiciaires. Il peut, sous sa responsabilité, déléguer ses pouvoirs à l'un de ses membres ou même, si les statuts ou l'assemblée générale l'y autorise, à un tiers"; que l'article 11 des statuts de l'association requérante prévoit ce qui suit : "le Conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour faire tous actes d'administration ou de disposition qui intéressent l'association. Il a dans sa compétence tous les actes qui ne sont pas réservés par la loi ou les présents statuts à l'assemblée générale ... Le Conseil d'administration peut ... plaider tant en demandant qu'en défendant, devant toutes juridictions"; que l'article 13 des mêmes statuts porte ce qui suit "Les activités judi- ciaires, tant en demandant qu'en défendant sont suivies au nom de l'association par le Conseil d'administration ou le Bureau. Le Conseil d'Administration peut déléguer le droit de prendre des décisions en la matière à deux membres désignés à cette fin";

    Considérant qu'il apparaît de l'analyse des statuts de la partie requérante que seul son Conseil d'administration peut décider de l'intentement des ac- tions;

    qu'à la suite d'une instruction de l'auditeur rapporteur, l'association requérante a communiqué au Conseil d'Etat un extrait du procès-verbal d'une réunion de son Conseil d'administration du 14 octobre 1997, aux termes duquel un membre de ce conseil "propose un recours concernant les nouvelles mesures contre le regroupement familial. Le CA est d'accord et renvoie au bureau"; qu'il apparaît que la décision d'introduire un recours contre l'acte attaqué a été valablement prise;

    Considérant que, par ailleurs, la partie requé- rante a produit en annexe de son mémoire en réplique les documents attestant qu'elle a déposé au greffe du tribunal civil de Bruxelles, la liste de ses membres pour l'année 1997 ainsi que pour les années antérieures; que la listedes administrateurs, modifiée par une assemblée générale en juin 1997 a été publiée aux annexes du Moniteur belge le 23 octobre 1997;

    Considérant que l'exception ne peut être retenue;

    Considérant, quant à l'intérêt pour agir, que les parties adverses prétendent que "l'A.S.B.L.

    Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie ne satisfait pas au prescrit de la jurisprudence relative à la défense d'un intérêt collectif, distinct de l'intérêt général et de celui des membres de l'association sans but lucratif, qui soit affecté par les dispositions entrepri- ses et dont elle poursuit de manière durable, en raison de son objet social, la défense";

    Considérant que l'association requérante a pour objet, selon l'article 2 de ses statuts, la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie;

    qu'elle "appelle à l'union et à l'action tous ceux qui entendent s'opposer aux discriminations, aux haines, aux préjugés fondés sur la race, la langue, l'origine ou la confession ou l'appartenance philosophique et faire triompher l'ami- tié et la paix entre les peuples, l'égalité et la frater- nité entre les hommes"; que ces objectifs ne se confondent ni avec l'intérêt général ni avec l'intérêt individuel des membres de l'association; que l'objet social de l'asso- ciation est réellement poursuivi, ainsi qu'en attestent les activités qu'elle exerce et qu'elle précise dans ses écrits de procédure; que la circulaire critiquée se donne pour but d'"apporter des éclaircissements" quant aux documents qu'un étranger doit produire "afin d'obtenir un visa en vue de conclure un mariage dans le Royaume ou d'obtenir un visa de regroupement familial sur la base d'un mariage conclu à l'étranger"; que, plus largement, la circulaire traite des formalités qui conditionnent la...

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