Décision judiciaire de Conseil d'État, 14 décembre 2007

Date de Résolution14 décembre 2007
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION DU CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

A R R E T

no 177.923 du 14 décembre 2007 G./A.185.208/VI-17.522

En cause : EHNIMB Michaël,

ayant élu domicile chez

Me Bruno MULKAY, avocat, quai de l’Ourthe, nº 44-02, 4020 Liège,

contre :

l’Etat belge, représenté par le Ministre de l’Intérieur.

------------------------------------------------------------------------------------------------------LE PRESIDENT F.F. DE LA VI e CHAMBRE, SIEGEANT EN REFERE,

Vu la requête unique introduite le 10 septembre 2007 par Michaël EHNIMB qui demande l’annulation et la suspension de l’exécution de la décision du Ministre de l’Intérieur du 12 juillet 2007 lui refusant la carte d’identification nécessaire à l’exercice de fonctions d’exécution au sein d’une entreprise de gardiennage;

Vu la note d'observations et le dossier administratif;

Vu le rapport de M. THIBAUT, Auditeur au Conseil d’Etat;

Vu l'ordonnance du 30 novembre 2007, notifiée aux parties, convoquant celles-ci à comparaître le 10 décembre 2007 à 14 heures;

Entendu, en son rapport, M. NIHOUL, Conseiller d’Etat, Président f.f.;

Entendu, en leurs observations, Me Bruno MULKAY, avocat, comparaissant pour la partie requérante et M. Philippe JAQUEMYNS, attaché, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. THIBAUT, Auditeur;

VI-17.522-1/15

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

I. QUANT AUX FAITS

Considérant que les faits utiles à l’examen de la requête sont les suivants :

  1. Le 30 août 2001, le requérant réussit la formation de base du personnel d’exécution des entreprises de gardiennage et des services internes de gardiennage. Le 22 avril 2003, il réussit également la formation "contrôle de personnes type long" du personnel d’exécution des entreprises de gardiennage et des services internes de gardiennage. Depuis janvier 2005, il est membre d’un club canin en qualité d’homme assistant entraîneur et maître chien.

  2. Le 25 novembre 2004, le requérant, qui indique "exercer une fonction exécutive dans une entreprise de gardiennage, consistant en la surveillance et la protection de biens mobiliers ou immobiliers et la surveillance et le contrôle de personnes dans le cadre du maintien de la sécurité dans les lieux accessibles au public", consent à l’enquête de moralité prescrite par la loi du 10 avril 1990 sur les entreprises de gardiennage, sur les entreprises de sécurité et sur les services internes de gardiennage, devenue, le 10 janvier 2005, la loi réglementant la sécurité privée et particulière.

  3. Le 10 décembre 2004, une entreprise de gardiennage sollicite l’octroi d’une carte d’identification pour le requérant.

  4. Le 24 février 2005, les services de la partie adverse demandent à la police fédérale l'exécution d'une enquête de moralité, devenue entre-temps enquête relative aux conditions de sécurité, concernant le requérant.

  5. Le 19 juin 2006, un inspecteur principal de la police fédérale dépose le rapport d’enquête de sécurité auprès des services de la partie adverse. Ce rapport indique que le requérant est concerné par un fait : un procès-verbal du 13 mai 2005 concernant des faits de coups et blessures volontaires s’étant déroulés à Awans le 13 mai 2005 vers quatre heures du matin; il précise que l’affaire a été classée sans suite, "l’infraction (étant) à caractère relationnel".

  6. Le 27 juin 2006, la commission "enquêtes sur les conditions de sécurité" émet un avis défavorable à l’octroi de la carte d’identification demandée.

    VI-17.522-2/15

    7. Le 30 novembre 2006, les services de la partie adverse informent le requérant que le Ministre de l’Intérieur envisage de refuser de lui délivrer la carte d’identification demandée sur la base du procès-verbal du 13 mai 2005, qu’il lui est loisible de prendre connaissance de ce dossier dans un délai de quinze jours et qu’il dispose d’un délai de quarante jours pour transmettre ses observations.

  7. Le 18 janvier 2007, le requérant expose par écrit aux services de la partie adverse ses arguments à propos du procès-verbal précité, à savoir qu’il a été hospitalisé du 8 janvier au 30 mars 2005 à la suite d’un accident de la route qui lui a causé un coma de 25 jours, qu’il a subi ensuite plusieurs séances de rééducation, qu’il n’était pas en mesure de chercher la bagarre le soir des faits, qu’il était encore "sur la mutuelle" et donc pas en service le 13 mai 2005 et qu’il "s’agit uniquement de légitime défense".

  8. Le 1er mars 2007, le requérant est entendu par deux agents de la partie adverse, leur expose sa version des faits et indique avoir travaillé de septembre à décembre 2006 pour des entreprises de gardiennage et disposer d’une proposition de travail.

  9. Le 2 mars 2007, le requérant envoie aux services de la partie adverse un certificat de son médecin traitant indiquant qu’il lui paraît difficile que le requérant ait pu, à l’époque, porter des coups violents en raison de la rééducation qu’il suivait à la suite de l’accident de roulage précité.

  10. Le 12 juillet 2007, le Ministre de l’Intérieur prend la décision suivante, qui constitue l’acte attaqué :

    " Concerne : loi du 10 avril 1990 - refus de délivrance de la carte d’identification d’agent de gardiennage

    Monsieur,

    Une demande a été introduite afin d’obtenir, pour vous, une carte d’identification comme agent de gardiennage. Afin de pouvoir exercer des activités de gardiennage, vous devez satisfaire aux conditions fixées à l’article 6 de la loi du 10 avril 1990.

    Une de ces conditions est fixée par l’article 6, alinéa 1, 8/ de la loi précitée. Cet article stipule que les personnes qui exercent une fonction d’exécution au sein d’une entreprise de gardiennage doivent satisfaire aux conditions de sécurité nécessaires à l’exercice de celle-ci et ne pas avoir commis de faits qui, même s’ils n’ont pas fait l’objet d’une condamnation pénale, constituent un manquement grave à la déontologie professionnelle et de ce fait portent atteinte au crédit de l’intéressé.

    VI-17.522-3/15

    L’article 7 prévoit que les personnes qui font l’objet d’une enquête relative aux conditions de sécurité doivent y avoir consenti préalablement et une seule fois. Vous avez consenti, le 25 novembre 2004, à ce qu’une telle enquête soit effectuée.

    L’enquête qui a été réalisée par les services de police a révélé dans votre chef un certain nombre de renseignements de nature judiciaire et administrative ainsi que des données professionnelles qui sont importantes dans le cadre de l’appréciation des conditions de sécurité visées à l’article 6, alinéa 1, 8/ de la loi précitée et qui font l’objet du rapport de l’officier de police en charge de cette enquête.

    Le rapport d’enquête fait, notamment, état de l’élément suivant:

    • Procès-verbal numéro LI.43.L9.102669/2005 concernant des faits de coups et blessures volontaires.

    Sur base de ce rapport, la Commission «enquêtes sur les conditions de sécurité» a émis son avis le 27 juin 2006. Elle estime que vous ne satisfaites pas aux conditions de sécurité et qu’une procédure visant au refus de délivrance de votre carte d’identification doit être initiée.

    Vous avez été mis au courant de ces faits et de l’éventualité d’un refus d’octroi de votre carte d’identification d’agent de gardiennage par le courrier du 30 novembre 2006. Vous avez été informé que vous pouviez, durant toutes les phases de la procédure, vous faire assister par un conseil de votre choix. Il a également été porté à votre connaissance que vous disposiez d’une part d’un délai de 15 jours ouvrables à compter de la date de réception de cette lettre pour prendre connaissance de votre dossier et en recevoir une copie et d’autre part d’un délai de 40 jours ouvrables pour faire valoir vos moyens de défense par lettre recommandée à la poste. Ce courrier nous est revenu avec la mention «non réclamé». Une copie vous a été envoyée par courrier simple le 15 janvier 2007.

    Vous avez fait parvenir vos moyens de défense par courrier du 18 janvier 2007, réceptionné le 9 février 2007.

    Par votre fax du 23 février 2007, vous avez demandé d’être auditionné.

    Vous avez été auditionné par deux agents de la Direction Sécurité Privée le 1er mars 2007.

    Par votre fax du 2 mars 2007 et votre courrier recommandé du même jour, vous avez transmis une attestation médicale.

    *

    Considérant que le procès-verbal numéro LI.43.L9.102669/2005 a été dressé à votre encontre et concerne des faits de coups et blessures volontaires;

    Que les faits peuvent être résumés comme suit :

    Le 13 mai 2005, vers 4 heures, la victime (un homme) se rend dans un club de rencontre, «Le Cotton club», à AWANS. Vous vous y trouvez en compagnie d’un ami. Selon la victime, vous lui avez...

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