Décision judiciaire de Conseil d'État, 4 juillet 2005

Date de Résolution 4 juillet 2005
JuridictionVI
Nature Arrêt

CONSEIL D'ETAT, SECTION D'ADMINISTRATION.

A R R E T

nº 147.262 du 4 juillet 2005

A.70.382/VI-15.585

En cause : la société anonyme HOUYOUX, ayant élu domicile chez Me Michel DELNOY, avocat, rue Simonon, nº 13, 4000 Liège,

contre :

LA RÉGIE DES BÂTIMENTS,

ayant élu domicile chez

Me Bernard RENSON, avocat, avenue de la Chasse, nº 132, 1040 Bruxelles.

-------------------------------------------------------------------------------------------------------LE CONSEIL D'ETAT, VI e CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 19 août 1996 par la société anonyme André HOUYOUX qui demande l'annulation de "la décision du 29 mai 1996 de Monsieur le Ministre de la Fonction publique relativement à un marché de la Régie des bâtiments et accordant à la S.A. VANDERSTRAETEN (...) le marché de la construction d’un centre fermé pour illégaux à Vottem, Coin des rues Verte-Voie et Visé-Voie, (Lot I, grosoeuvre - cahier des charges n/ 95.61.15../021A)" (lire "cahier des charges no 95/61.1533/021A");

Vu les mémoires en réponse et en réplique régulièrement échangés;

Vu le rapport de M. DEROUAUX, Premier auditeur chef de section au Conseil d'Etat;

Vu l'ordonnance du 3 août 2000 ordonnant le dépôt au greffe du dossier et du rapport;

VI -15.585 - 1/24

Vu la notification du rapport aux parties et le dernier mémoire de la partie requérante;

Vu l'ordonnance du 27 novembre 2001, notifiée aux parties, fixant l'affaire à l'audience du 19 décembre 2001;

Entendu, en son rapport, M. HANSE, Conseiller d'Etat;

Entendu, en leurs observations, Me Philippe LEVERT, loco Me Michel DELNOY, avocat, comparaissant pour la requérante et Me Bernard RENSON, avocat, comparaissant pour la partie adverse;

Entendu, en son avis conforme, M. DEROUAUX, Premier auditeur chef de section;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'Etat, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les faits utiles à l'examen de la requête se présentent comme suit :

  1. Le 16 juin 1995, le Ministre de la Politique scientifique et de l’Infrastructure approuve le cahier spécial des charges n/ 95/61.1533/021A pour la construction d’un centre fermé pour illégaux à Vottem.

    Le mode de passation du marché est l’adjudication publique.

    Le cahier spécial des charges, en page 18, prévoit ce qui suit à titre de "compléments et précisions relatifs à l’A.R. du 22.04.1977": " b) de l’établissement de la soumission.

    Article 14

    La soumission et le métré récapitulatif sont établis sur les documents prévus à cet effet dans le cahier spécial des charges, lesquels constituent le modèle prévu à l’article 14 de l’arrêté royal du 22 avril 1977. (...)

    Toutes mentions contraires au modèle prévu à l’Administration sont réputées non écrites, exception faite des postes dont les quantités ont été modifiées conformément à l’article 20 § 2 de l’arrêté royal du 22 avril 1977 qui, avec les omissions, figurent en dernières pages de mon document.".

    En page 20, le cahier spécial des charges prévoit encore ce qui suit :

    VI -15.585 - 2/24

    " Article 20

    La modification des quantités présumées est interdite à moins d’une erreur manifeste. Le métré récapitulatif comporte quatre volets : Volet A - Métré récapitulatif original. Dans ce volet, l’entrepreneur ne peut apporter aucune modification aux quantités. Volet B - Quantités en plus Dans ce volet, l’entrepreneur signale les quantités en plus pour les postes à quantité forfaitaire.

    Volet C - Quantités en moins.

    Dans ce volet, l’entrepreneur signale les quantités en moins pour les postes à quantité forfaitaire.

    Volet D - Lacunes Dans ce volet, l’entrepreneur signale les lacunes dans le métré récapitulatif.".

    En page 33, le cahier spécial des charges insiste comme suit sur les "mesures préliminaires":

    " Le soumissionnaire, et plus tard l’adjudicataire, effectue à ses frais exclusifs toutes opérations de reconnaissance qu’il jugera nécessaires ou utiles en complément aux reconnaissances dans le site de l’Ouvrage afin de se rendre compte de la nature exacte du terrain et des configurations des constructions existantes telles que les égouts, canalisations, fondations ou tout autre ouvrage souterrain ou aérien (ligne HT et mouvement de grues de chantier, ...) pouvant se trouver à l’emplacement des constructions à ériger. (...).".

  2. Le 16 novembre 1995, lors de la séance d’ouverture des soumissions, il apparaît que six soumissions ont été déposées et provisoirement classées dans l’ordre suivant: " 1. S.A. HOUYOUX: 257.267.101 francs 2. S.A. WUST: 257.893.852 francs 3. S.A. VANDERSTRAETEN: 259.961.386 francs (...).".

  3. Le 4 décembre 1995, l’ingénieur en chef-directeur des Ponts et Chaussées LIVET transmet par voie hiérarchique un rapport présentant le résultat de l’adjudication publique, au terme duquel, après avoir opéré différentes corrections, il propose de retenir la soumission de la S.A. VANDERSTRAETEN au montant de 261.078.995 francs.

  4. Le 13 décembre 1995, il adresse cependant par recommandé à la S.A. VANDERSTRAETEN une demande de justification d’un prix anormalement bas pour le poste n/ 129 - poutres de fondation.

  5. Le 15 décembre 1995, la S.A. VANDERSTRAETEN répond et justifie son prix par un système de coffrage particulièrement performant et financièrement

    amorti.

    VI -15.585 - 3/24

    6. Le 18 décembre 1995, l’ingénieur LIVET informe la S.A. VANDERSTRAETEN, en application de l’article 25 de l’arrêté royal du 22 avril 1977 relatif aux marchés publics de travaux, de fournitures et de services, de ce que, après examen des justifications fournies dans sa lettre du 15 décembre 1995, le prix du poste N/ 129 est considéré comme anormalement bas.

    Cette décision est toutefois dépourvue de toute motivation.

  6. Le 19 décembre 1995, la S.A. VANDERSTRAETEN conteste ce point de vue et suggère à la partie adverse de vérifier le bien-fondé de ses explications auprès des services des bâtiments militaires pour lesquels elle est en train d’exécuter des travaux semblables.

  7. Le même 19 décembre 1995, le service de Liège de la Régie des bâtiments établit un rapport d’adjudication à l’intention de la Régie des bâtiments, Inspection

    générale wallonne à Bruxelles.

    Il y indique, sans aucune explication, que, "après examen des opérations arithmétiques et rectifications éventuelles, le classement des soumissionnaires s’établit comme suit : 1. S.A. VANDERSTRAETEN 263.405.469,-2. S.A. HOUYOUX 268.364.591,-(...).".

    Il précise encore ce qui suit :

    " Des différentes remarques formulées par les entrepreneurs en annexe à leur soumission, mon service a retenu, après vérification, les rectifications suivantes (certaines quantités présumées ont été rectifiées en raison de l’erreur manifeste qu’elles contenaient conformément à l’article 20 des conditions administratives du cahier spécial des charges) :

    QUANTITÉS EN PLUS :

    119 Béton propreté v.v. Q.P. 100 m² > 1500 m² 333 Lavabo porcelaine Q.F. 72 > 88 339 W.C. complet Q.F. 22 > 26

    Conformément à l’article 31, § 1er, A, 1/ de l’A.R. du 22 avril 1977, les quantités en plus ont été portées à tous les métrés indistinctement.

    Il s’ensuit le classement ci-après :

  8. S.A. VANDERSTRAETEN 264.075.786,-

    VI -15.585 - 4/24

    2. S.A. HOUYOUX 269.081.600,-(...).

    QUANTITÉS EN MOINS :

    165 Maçonnerie fondation VV. Q.P. 1320 M³ > 570 m³ 364 Revêtement synthétique terrain volley Q.P. 900 M² > 286 m² 365 Pyramides Q.P. 990 M2 > 216 m² Conformément à l’article 31, § 1er, A, 2/, de l’A.R. du 22 avril 1977, les quantités en moins ont été appliquées aux seuls soumissionnaires qui les ont signalées (HOUYOUX, MOURY, VANDERSTRAETEN, BEERTS, WUST).

    Il s’ensuit le classement ci-après :

  9. S.A. VANDERSTRAETEN 260.631.703,-2. S.A. HOUYOUX 261.080.559,-(...).

    LACUNE :

    L’A.M. MOURY-GALERE signale l’omission de l’article 271.1 - Ensemble extérieur, bâtiment administratif, local surveillants, accueil, contrôle (1 ouvrant + 2 vitrages latéraux) - PIÈCE - 1.

    Le calcul du prix unitaire du poste omis a été effectué, pour les autres soumissionnaires, conformément à l’article 32, § 2, 1/, de l’A.R. du 22 avril 1977.

    Il s’ensuit le classement ci-après :

  10. S.A. VANDERSTRAETEN 261.078.995,-2. S.A. HOUYOUX 261.528.620,-EXAMEN DE LA SOUMISSION LA PLUS BASSE :

    S.A. VANDERSTRAETEN à Lummen.

    (...).

    De l’examen des prix unitaires de l’offre précitée, en particulier les montants des articles relatifs aux fondations en béton armé ( n/ 121 à 129 et n/ 131 à 132), il ressort que le prix du poste 129 présente un caractère apparemment anormalement bas.

    Conformément à l’article 25 de l’A.R. du 22.04.1977, mon service a prié la S.A. VANDERSTRAETEN de justifier ce prix.

    Après analyse de la justification, mon service confirme le caractère anormalement bas du montant du poste 129. La S.A. VANDERSTRAETEN en a été informée par courrier.

    Le caractère anormalement bas de ce prix est d’autant plus préjudiciable qu’il influe sur le classement et permet ainsi à la S.A. VANDERSTRAETEN d’occuper la première place au détriment de la S.A. HOUYOUX.

    VI -15.585 - 5/24

    En conséquence, je propose de considérer l’offre de la S.A. VANDERSTRAETEN comme irrégulière et partant comme nulle et non avenue, en application de l’article 25 de l’A.R. du 22.04.1977.

    Compte tenu de ce qui précède, il a été procédé à l’examen de l’offre de la S.A. HOUYOUX à Marloie, classée deuxième.

    (...).

    PROPOSITION D’APPROBATION :

    Je propose l’approbation de l’offre déposée par la S.A. HOUYOUX à Marloie, classée deuxième, au montant de 261.528.620,- frs T.V.A. comprise.

    (...).".

  11. Le 25 janvier 1996, l’ingénieur LIVET du service de Liège de la Régie des Bâtiments écrit notamment ce qui suit à l’attention de l’inspecteur général de la Régie des bâtiments à Bruxelles :

    " Sachant que des puits de phosphate existent dans le sous-sol avoisinant le site retenu pour la construction du Centre fermé pour illégaux de VOTTEM, notamment dans le périmètre de la Gendarmerie, j’ai souhaité qu’une campagne de reconnaissance par gravimétrie soit réalisée afin de pouvoir définir le type de fondation des futurs bâtiments.

    Or les résultats d’une telle...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT