Arrêt nº 103058 de Conseil du Contentieux des Etrangers - Ie Chambre, 17 mai 2013

ConférencierS. Gobert
Date de Résolution17 mai 2013
SourceConseil du Contentieux des Etrangers - Ie Chambre
PaysBurkina-Faso

n° 103 058 du 17 mai 201 dans l'affaire X / I

En cause : X

ayant élu domicile : X

contre :

le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides

LE PRÉSIDENT F.F. DE LA I e CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 7 février 2013 par X, qui déclare être de nationalité burkinabé, contre l décision du Commissaire adjoint aux réfugiés et aux apatrides, prise le 16 janvier 2013. Vu l'article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement e l'éloignement des étrangers. Vu le dossier administratif. Vu l'ordonnance du 22 mars 2013 convoquant les parties à l'audience du 17 avril 2013. Entendu, en son rapport, S. GOBERT, juge au contentieux des étrangers. Entendu, en leurs observations, la partie requérante représentée par Me C. MOMMER loco Me M.

GRINBERG, avocat, et K. GUENDIL, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse. APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L'ARRET SUIVANT :

1. L'acte attaqué

Le recours est dirigé contre une décision de refus du statut de réfugié et de refus du statut de protectio subsidiaire, prise par le Commissaireadjoint aux réfugiés et aux apatrides, qui est motivée comme suit : « A. Faits invoqués

Selon vos dernières déclarations, vous êtes de nationalité burkinabée, d'appartenance ethnique moss et de religion catholique. Vous êtes arrivée en Belgique le 26 mars 2012 et vous avez introduit votr demande d'asile le lendemain. Vous êtes née 6 mars 1979 à Ouagadougou. Vous êtes mariée à [D.M.] depuis le 29 décembre 2011.

Vous êtes veuve de [K.I.] avec qui vous avez eu trois enfants ; [K.K.], né en 2007 à Ouagadougou,

[K.S.], née en 2009 à Ouagadougou et [S.S.W.], né en 2012 à Gand en Belgique. Vous invoquez les faits suivants à l'appui de votre demande. CCE X - Page 1 En 1996, votre père refuse de continuer à payer vos études. Votre oncle vous propose de vous paye une formation dans une école professionnelle de la santé. Vous acceptez et suivez cette formation d 1996 à 1998. En 1998, vous travaillez comme stagiaire accoucheuse auxiliaire au centre médical de Pole 6. En mars 2001, vous êtes contrainte de quitter votre stage et de rentrer chez vos parents. A votre retour,

vous êtes chargée d'entretenir la maison et d'accomplir toutes les tâches ménagères. Votre père,

alcoolique, passe son temps à vous insulter. En 2002 et 2003, vos petites soeurs [Ed.] et [Es.] se marient. Votre relation avec votre père se dégrade.

Il vous fait savoir qu'il compte trouver un moyen de se débarrasser de vous. En 2004, votre père vous annonce qu'il va vous donner en mariage à son ami [K.I.]. Face à votre refus,

votre père menace de vous bannir vous et votre mère. Votre mère ayant déjà dû subir de nombreuse épreuves et menaces aux côtés de votre père, vous refusez de la mettre dans une situation difficile e vous finissez par accepter le mariage. En mars 2004, vous vous mariez à [K.I.]. Le 28 octobre 2011, la police vous informe que votre mari est décédé dans un accident de moto. Après un mois de deuil, les enfants de votre mari, issus de son précédent mariage, vous demandent d quitter la cour de votre mari. Les marabouts qu'ils ont consultés prétendent que vous êtes la cause d décès de leur père. Vous refusez de quitter la cour. Vous êtes malade et enceinte à cette époque. Le 3 novembre, les enfants de votre mari se mettent à détruire le toit de votre maison pour vous forcer à

partir. Ils ne vous laissent pas emmener vos enfants. Vous êtes donc contrainte de partir seule. Vou rentrez chez vos parents. Deux semaines plus tard, votre père vous informe qu'il va vous redonner en mariage. Vous refusez mais

il menace de vous tuer. Vous êtes mariée le 29 décembre 2011 à [D.M.]. Vous êtes emmenée à Kaya dans sa maison. Bien qu vous ne vouliez pas entretenir de relations intimes avec cette personne, vous n'avez pas la force d lutter contre lui les deux premiers soirs suivant le mariage. Le troisième soir, vous faites savoir à votre mari que vous ne l'aimez pas et que vous êtes enceinte de

votre défunt mari. Il vous menace de mort et vous rappelle qu'il a tué sa première femme alors qu'elle

était enceinte. Il vous fait également savoir qu'il compte vous faire ré-exciser après votre accouchement. Ensuite, vous contactez votre amie qui habite à Kaya, [F.O]. Vous lui expliquez la situation et lu demandez de l'aide pour fuir de chez votre mari. Le 7ème jour suivant le mariage, alors que votre mari et sa première femme sont absents, votre ami vient vous chercher pour vous emmener à la gare routière. Vous vous rendez à Ouagadougou che votre tante, [L.S.]. Le 7 janvier 2012, votre père vous retrouve chez votre tante. Vous prenez la fuite avant qu'il ne vienne

vous chercher. Vous vous rendez à Rapadma U2 chez votre amie [S.A.]. Celle-ci accepte de vou héberger temporairement, le temps que vous trouviez une autre solution. Vous contactez alors [O.B.], un ami de votre défunt mari pour lui demander de l'aide. Il accepte et vou fait savoir qu'il va régler votre problème. Le 25 mars 2012, il vient vous chercher pour vous emmener à Ouagadougou. Il vous confie à u passeur, [B.S.]. C'est ainsi que vous quittez le Burkina Faso le soir même. B. Motivation

CCE X - Page 2 Après avoir analysé votre dossier, le CGRA n'est pas convaincu que vous avez quitté votre pays en

raison d'une crainte fondée de persécution au sens défini par la Convention de Genève du 28 juillet

1951 ou en raison d'un risque réel d'encourir des atteintes graves tel que prescrit par l'article 48/4 de la

Loi du 15 décembre 1980 relatif à la protection subsidiaire. Ainsi, à l'appui de votre demande d'asile, vous déclarez craindre votre second époux et votre père qui

veulent vous obliger à accepter votre second mariage. Vous craignez que votre second mari vous fass subir de mauvais traitements et qu'il vous ré-excise (audition, p.25). Pour commencer, le CGRA tient à souligner que sur base de l'article 48/5 §3 de la loi du 15 décembre

1980, " il n'y a pas lieu d'accorder la protection internationale lorsque dans une partie du pays d'origine,

il n'y a aucune raison de craindre d'être persécuté ni aucun risque réel de subir des atteintes graves et

qu'on peut raisonnablement attendre du demandeur qu'il reste dans cette partie du pays. Dans ce cas,

l'autorité compétente doit tenir compte, au moment où elle statue sur la demande, des conditions

générales prévalant dans le pays et de la situation personnelle du demandeur ». Or, le CGRA constate que vous pourriez vous installer en sécurité au Burkina Faso dans une autr partie du pays. Et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, il ressort de vos déclarations que tous vos problèmes ont eu lieu à Ouagadougou et à

Kaya. Le CGRA constate donc que la crainte que vous invoquez est limitée à une partie du pays, à

savoir à proximité de chez votre père à Ouagadougou et de chez votre mari à Kaya. Ainsi, la seul crainte que vous invoquez quant à la possibilité de vous installer dans une autre région du Burkina Fas est que « de bouche à oreille, un jour ils peuvent découvrir où je suis : des commerçants qui me voien comme ça et qui ne savent même pas que j'ai des problèmes avec mon père peuvent aller lui dire

comme ça, tiens, j'ai vu ta fille » (audition, p.23). Cette crainte est hypothétique dans un pays dont l superficie est de presque 9 fois celle de la Belgique. De plus, le CGRA constate que vous avez véc presque trois mois au Burkina Faso, à Rapadma U2 chez votre amie, sans rencontrer de problèm (audition, p.22). Bien que vous étiez malade en raison de votre grossesse, vous participiez à la vie d village lorsque vous vous trouviez sur place. Ainsi, vous aidiez votre amie à faire de la sensibilisatio auprès des femmes (audition, p.22). Vous l'aidiez également pour compléter les regi stres (audition,

p.22). Ces éléments démontrent que vous pourriez vous installer tout comme votre amie, dans u village burkinabé et y mener une vie en sécurité. Deuxièmement, vous expliquez que, suite au décès de votre premier mari, « mon plan était de reste chez mon mari et voir si on pouvait me recruter encore et si on m'envoie dans une autre province, j vais avec mes enfants, comme le cas de ma copine, elle n'est pas marieé, dans le centre CSPS, elle est

accoucheuse auxiliaire, elle a sa maison dans le village à côté de la maternité, elle a deux chambres, u endroit pour se laver, les wc dehors. » (audition, p.16). Ainsi, comme vous l'expliquez pour votre amie, il

est possible pour une femme, possédant un diplôme identique au vôtre, de s'installer se ule dans u village et de travailler pour subvenir à ses besoins. Vous avez d'ailleurs par le passé réussi le concours

de recrutement et avez été affectée dans le Sahel mais à l'époque, votre mari ne tenait pas à vous voir

partir là-bas (audition, p.6). Troisièmement, interrogée au sujet de vos possibilités suite à ce second mariage, vous déclarez que s vous aviez postulé et été recrutée, vous auriez pu être affectée dans une autre province burkinabée e vous installer là-bas (audition, p.23). Ce qui vous en empêchait était le fait que votre amie ne désirai pas que vous restiez trop longtemps chez elle (audition, p.23). De plus, vous n'y avez pas pensé car

vous ne saviez où aller (audition, p.23). Le seul obstacle donc à votre installation au Burkina Faso était d'avoir un endroit où rester le temps

d'effectuer les démarches afin de trouver un travail. Vous expliquez en effet, « si peut- être j'arrivais à

rester chez ma copine, peut-être ça aurait été » (audition, p.23). Or, le CGRA constate que vous avez le soutien financier de l'ami de votre mari. Cette personne, en plus

d'avoir organisé et financé votre voyage, a donné de l'argent à votre amie pour votre hébergement

(audition, p.13). Vous avez également le soutien de nombreux membres de votre famille. Anisi, votr oncle paternel [M.] qui vit à Bobo-Dioulasso désapprouve les comportements et les choix de votre pèr (audition,...

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