Arrêt nº 39257 de Conseil du Contentieux des Etrangers - Ie Chambre, 24 février 2010

ConférencierS. Bodart C. Adam B. Louis
Date de Résolution24 février 2010
SourceConseil du Contentieux des Etrangers - Ie Chambre
PaysBurundaise

n° 39 257 du 24 février 2010

dans l’affaire X / I

En cause:

X

Ayant élu domicile:

X

contre:

Le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides

LE CONSEIL DU CONTENTIEUX DES ETRANGERS, Ie CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 31 août 2009 par X, qui déclare être de nationalité burundaise contre la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, prise le 30 juillet 2009.

Vu l’article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers.

Vu le dossier administratif et la note d’observation.

Vu l’ordonnance du 22 décembre 2009 convoquant les parties à l’audience du 29 janvier 2010.

Entendu, en son rapport, C. ADAM, juge au contentieux des étrangers.

Entendu, en leurs observations, la partie requérante assistée par Me J. M. NKUBANYI, avocat, et K. GUENDIL, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.

APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L’ARRET SUIVANT:

  1. L’acte attaqué

    Le recours est dirigé contre une décision de refus du statut de réfugié et de refus du statut de protection subsidiaire, prise par le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, qui est motivée comme suit:

    Faits invoqués

    Selon vos dernières déclarations, vous êtes de nationalité burundaise et d’appartenance ethnique tutsi.

    Vous êtes née le 25 août 1975 à Remera (Muramvya). Depuis 2003, vous êtes titulaire d’une licence en

    agronomie de l’Université du Burundi.

    Le 3 novembre 2001, vous épousez BIGIRINDAVYI Jean Berchmans.

    Entre 2004 et 2006, vous êtes fonctionnaire au ministère de l’environnement.

    Le 12 septembre 2006, vous séjournez en Belgique où votre mari est étudiant à l’Université de Liège.

    En 1993, votre père est assassiné par des assaillants hutu, dont deux voisins, deux frères, BARISIZE Bernard et BARISIZE Diomède. En 1994, votre famille porte plainte et les deux frères sont emprisonnés.

    En avril 2001 se tient leur procès, mais celui-ci est ajourné suite à un problème avec les témoins.

    En 2006, Bernard et Diomède sont libérés suite à une décision présidentielle, et en juin 2006, ils se mettent aussitôt à harceler votre famille, demandant à récupérer une partie de vos terres qu’ils revendiquent comme étant la leur. Votre frère Ferdinand se fait d’ailleurs agresser sur cette terre ; plainte est déposée et les deux frères sont détenus deux semaines durant.

    A leur libération, les deux frères rejoignent la rébellion du FNL.

    En mars 2008, Bernard et Diomède, armés, reviennent et menacent votre frère s’il persiste à refuser de leur céder vos terres. Une nouvelle plainte est déposée par votre frère ; il lui est alors proposé de passer par une conciliation avec les sages du village.

    En mai 2008, Bernard est assassiné. Diomède impute ce crime à votre famille, prétendant que c’est votre frère Ferdinand qui a fait tuer Bernard et que c’est vous qui avez financé cet assassinat.

    Le 22 mai 2008, votre frère est tué à son domicile par Diomède. La police constate le meurtre le lendemain ; votre mère et votre soeur se réfugient chez votre soeur Béatrice à Ryarusera.

    Le 2 juillet 2008, vous recevez une lettre de votre soeur Béatrice. Elle vous y annonce la mort de votre frère Ferdinand et vous informe que vous êtes également menacée de mort par Diomède. Vous décidez alors d’introduire une demande d’asile le 10 juillet 2008.

    Vous avez été entendue à l’Office des étrangers le 14 juillet 2008 dans le cadre du dépôt de votre demande d’asile. L’analyse approfondie de vos craintes a nécessité une dernière audition au Commissariat général le 14 novembre 2008.

    B. Motivation

    Après avoir analysé votre dossier, le Commissariat général n’est pas convaincu que vous avez quitté votre pays en raison d’une crainte fondée de persécution au sens défini par la Convention de Genève de 1951 ou en raison d’un risque réel d’encourir des atteintes graves telles que mentionnées dans la définition de la protection subsidiaire. Plusieurs éléments anéantissent la crédibilité de vos propos.

    Premièrement, le Commissarit général relève que vous introduisez votre demande d'asile suite à la réception d'une lettre de votre soeur. Or, ce courrier est de nature exclusivement privée, sa sincérité, sa fiabilité et sa provenance sont par définition invérifiables. Il ne peut donc lui être accordé qu'une force probante limitée, en l'occurrence insuffisante pour fonder la crainte de persécution alléguée à l'appui de votre demande d'asile.

    Quant à l'acte de décès que vous produisez, s'il tend à corroborer que votre frère est décédé suite à des coups et blessures, il ne confirme pas les autres éléments de votre récit qui souffre d'un réel manque de crédibilIté.

    Ensuite, force est de constater que vous ne fournissez aucune autre pièce susceptible d'appuyer vos déclarations et d'établir la réalité ainsi que le bien fondé de votre crainte, soit par exemple des preuves que votre famille a entamé depuis 1994 plusieurs démarches davant la justice pour obtenir réparation des préjudices subis à cause des frères BARISIZE.

    En effet, votre famille a porté plainte en 1994 contre les deux frères et ces derniers ont été arrêtés par les autorités et détenus (rapport d’audition du 18 novembre 2008, p.10). Or, vous ne produisez aucun document actant cette plainte.

    De même, vous dites que deux personnes ont témoigné avoir vu les deux frères parmi les assaillants à l’origine du massacre de votre famille (rapport d’audition du 18 novembre 2008, p.10). Or, vous ne produisez pas ces témoignages qui font partie du fondement de vos accusations.

    Par ailleurs, alors qu’un procès – interrompu – s’est tenu en 2001, vous affirmez n’avoir aucun document en rapport avec ce procès, que des documents ne sont donnés que s’il y a un prononcé de jugement (rapport d’audition du 18 novembre 2008, p.11). Quoi qu'il en soit, il vous aurait cependant été possible de retirer un document au Parquet prouvant que le procès était en cours.

    En mars 2008, votre frère a été agressé et s’en est plaint auprès des autorités qui ont proposé une conciliation devant les notables, et plus tard, l’assassinat de votre frère a été constaté par des policiers (rapport d’audition du 18 novembre 2008, p.14). A nouveau, vous ne produisez aucun document concernant ces événements.

    Le Commissariat général estime très peu crédible que vous soyez dans l’incapacité de produire ne fût-ce qu’un seul document permettant d’étayer la réalité de ces nombreuses démarches formelles auprès des autorités.

    Vous affirmez à plusieurs reprises qu’il vous serait difficile de vous procurer ces éléments, sans toutefois donner des raisons convaincantes qui justifieraient cette impossibilité (rapport d’audition du 18 novembre 2008, p.8, p.12 et p.16).

    Il convient de rappeler la...

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