Les solutions légales, et les autres...

AuteurPierre Jammar
Pages194-232

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Principes

Nul ne peut se faire justice à soi-même

: cet adage s'applique également aux conflits en matière de location.

Ainsi, si vous vous trouvez en litige avec le locataire pour quelque motif que ce soit, et même si vous avez toutes les raisons d'être persuadé de votre bon droit, vous ne pouvez le forcer à payer quoi que ce soit. Seul le juge peut trancher et décider des responsabilités et des droits.

En matière de location, une clause du bail qui prévoirait la résiliation automatique, soit pour non-paiement des loyers, soit pour une cession de bail interdite ne serait pas valable : seul le juge garde pouvoir d'appréciation selon les circonstances.

Les conflits en cause
Le point de vue du locataire

Sans un jugement, un locataire ne peut jamais être expulsé ni forcé à payer quoi que ce soit.

Quels que soient ses torts et quelles que soient les clauses du bail, un locataire peut toujours se maintenir dans les lieux et refuser de payer ce qui lui serait réclamé tant qu'un jugement n'a pas été rendu.

Le bailleur qui cherche à obtenir le départ de son locataire et se heurte à un refus de ce dernier doit donc toujours s'adresser au juge, et cela même si le bail était venu à échéance.

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En effet, seul un huissier de justice peut forcer un locataire à partir en le mettant, lui et ses biens, dehors (sur le trottoir..), mais il ne peut le faire que si le bailleur lui remet un jugement exécutoire.

En dehors de cette hypothèse, l'intervention d'un huissier ne peut constituer, en tant que telle, un ordre de payer ou de déguerpir.

Le point de vue du bailleur

Sans un jugement, un propriétaire ne peut être contraint à effectuer ou à payer quoi que ce soit.

Quelles que soient les clauses du bail ou son bon droit, le locataire ne peut, lui non plus, rien obtenir du propriétaire, en cas de conflit, sans passer par l'intermédiaire du juge.

Ainsi, lorsque le propriétaire refuse d'effectuer des réparations urgentes qui lui incombent manifestement, vous ne pouvez en principe les faire exécuter vous-même et déduire ensuite du loyer les frais exposés.

De même, si le locataire est persuadé n'avoir commis aucune dégradation locative, il n'a cependant pas le droit de suspendre en fin de bail le paiement des loyers échus en invoquant la compensation avec la garantie locative.

Que ce soit en cours de bail ou à la fin de celui-ci, le locataire doit toujours s'adresser au juge tant s'il veut contraindre le bailleur à faire quelque chose, que s'il veut obtenir certains remboursements (sauf si une loi spéciale l'autorise expressément à opérer une retenue sur son loyer, comme c'est le cas pour les réductions de précompte immobilier).

Le juge de paix

Le juge compétent est le Juge de Paix.

Tout litige locatif existant doit être porté devant le Juge de Paix du lieu où se trouve l'immeuble loué.

Chaque province comprend un ou plusieurs arrondissements judiciaires qui, à leur tour, sont divisés en plusieurs cantons judiciaires. Chaque canton est le siège d'une justice de paix.

Pour connaître l'adresse de la justice de paix, il suffit généralement de consulter l'administration communale du lieu où se trouve l'immeuble.

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Le Juge de Paix est le magistrat de proximité.

Il est nommé dans son canton à titre définitif: c'est donc lui qui connaît le mieux les usages locaux, et toutes les particularités du canton. Il est donc le mieux placé pour aider les bailleurs et locataires à résoudre l'ensemble de leurs difficultés. Pour ces raisons, la loi lui a confié le soin de régler tous les problèmes locatifs.

Toute justice de paix dispose d'un bureau administratif, appelé «greffe».

Les membres du personnel des greffes sont à l'écoute des habitants du canton, mais ne peuvent communiquer que des renseignements administratifs. Ils ne sont pas autorisés à les renseigner sur les aspects juridiques des situations qu'ils connaissent.

Dans un premier temps, le bailleur ou le locataire peuvent demander l'avis du Juge de Paix dans le cadre d'une procédure en conciliation. Les plus grands avantages de cette procédure sont sa totale gratuité et sa rapidité.

Celui qui souhaite introduire cette procédure de conciliation doit s'adresser au greffe et déposer une demande (appelée «requête»). Cette demande peut même s'effectuer verbalement, mais pour des raisons de compréhension, les juges de paix demandent souvent qu'elles soient écrites.

Le greffe convoque par simple lettre celui qui a introduit la demande et celui contre qui elle est dirigée. La convocation indique la date à laquelle le juge les entendra. Le juge écoute les parties, et proposera généralement une solution. Plusieurs possibilités peuvent se présenter :

* une des parties ne se présente pas : le Juge de Paix le constate, et le demandeur n'aura pas d'autre possibilité que d'introduire une procédure judiciaire;

* soit, le Juge de Paix parvient à concilier les parties. Dans ce cas, il leur fera signer un procès-verbal d'accord, qui aura la même valeur qu'un jugement. Si une des parties ne respecte pas volontairement les termes de l'accord, l'autre partie pourra l'y contraindre;

* soit, le Juge de Paix ne réussit pas à concilier les parties : dans ce cas, il ne restera que la procédure judiciaire. Il faut cependant noter que cette procédure sera introduite devant le même juge qui, en toute logique, imposera la solution qu'il aura proposée en conciliation. Pour cette raison, les parties accepteront plus facilement la solution proposée dans le cadre de la procédure en conciliation.

A défaut de tentative de conciliation, ou si le Juge de Paix n'est pas parvenu à mettre le bailleur et le locataire d'accord, la partie demanderesse devra prendre l'initiative d'introduire une procédure judiciaire.

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Il existe plusieurs manières d'introduire la procédure :

  1. La comparution volontaire devant le juge : le bailleur et le locataire constatent l'existence de leurs problèmes qu'ils ne peuvent pas résoudre ensemble. Ils désirent demander au juge de statuer: dès lors, ils signeront ensemble un document par lequel ils définissent les problèmes et leur position respective, et ils demandent au juge de se prononcer sur les différents points. Cette procédure est beaucoup plus rapide, et entraîne des frais de justice extrêmement réduits. Par contre, elle nécessite l'accord des deux parties pour porter le litige devant le Tribunal, ce qui sera rarement le cas.

  2. L'introduction de la procédure par requête: celui qui souhaite l'intervention du juge peut saisir le Juge de Paix en déposant une demande (une requête) en double exemplaire au greffe de la justice de paix. La requête n'est pas toujours facile à rédiger: pour être valable, elle doit obligatoirement contenir certains éléments prévus par la loi; elle est ensuite déposée au greffe avec un certificat de domicile récent de l'autre partie (pour permettre au greffier de prendre contact avec elle). Le greffier convoque les parties à une audience du Juge de Paix, par un pli recommandé auquel la requête est annexée: cela permet à chacun de connaître les motifs invoqués et d'être présent à l'audience. Cette procédure permet d'éviter les frais d'un exploit d'huissier.

  3. La procédure par assignation: la procédure peut également être introduite par assignation ou citation (c'est-à-dire un exploit d'huissier dans lequel une partie des arguments du demandeur seront repris). Cela signifie que le demandeur peut s'adresser à un huissier de justice qui se rendra chez le défendeur en lui communiquant la date à laquelle il devra comparaître devant le juge. Cette procédure est cependant moins rapide et entraîne plus de frais que les autres.

La loi n'impose pas l'intervention d'un avocat: elle est cependant fortement conseillée. En effet, le particulier...

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